Par Aurélien Véron*
Les Grecs clament leur innocence dans la crise qui frappe leur pays. Difficile de ne pas avoir de la compassion pour ce peuple blessé. Mais qui a élu les gouvernements successifs qui ont menti sur les chiffres et dépensé davantage que le montant de leurs recettes fiscales ?
Lorsqu’on vote, et même lorsqu’on s’abstient, on porte collectivement la responsabilité des politiques menées par ses élus. C’est l’inconvénient de la démocratie. Cela signifie que ce ne sont pas les marchés, l’Europe ou l’Allemagne qui sont à condamner, mais bien les électeurs grecs qui ont trop longtemps fermé les yeux, sinon encouragé leurs gouvernants à la tromperie.
L’Europe n’en a pas moins été généreuse : les derniers 130 milliards d’euros portent à 350 milliards la somme des aides à la Grèce depuis deux ans, soit l’équivalent de sa dette. La Grèce avait déjà bénéficié de 80 milliards de fonds structurels depuis les années 90. Aujourd’hui, le temps de la compassion est terminé, l’heure de la responsabilité a sonné. Entretenir le peuple grec dans l’idée qu’une solution viendra de l’extérieur, ce n’est pas les aider mais les entretenir dans une illusion dangereuse.
La Grèce n’est pas à son premier coup d’essai. En mai 2010, l’Europe et le FMI ont offert une première aide de 110 milliards d’euros à la Grèce après d’interminables négociations. En échange, Athènes devait mettre en œuvre un plan de modernisation accélérée de l’économie grecque. Promis juré, tout allait avancer vite.
Deux ans plus tard, rien n’a bougé d’un iota. La Troïka a même le sentiment que le nombre de fonctionnaires a augmenté en deux ans. Pourtant, il y a sacrément du boulot, car la Grèce figure toujours au 119e rang de l’Indice de Liberté Economique publié par la « Heritage Foundation », indice largement corrélé au potentiel de croissance économique du pays.
Devant l’inefficacité de ce premier plan rapidement englouti, une renégociation de la dette s’est tenue en 2011 auprès des créanciers privés non grecs. Banques, assureurs et comptes d’assurance vie des petits épargnants étrangers totalisent 70 % de la dette grecque. Sous la pression des gouvernements, ces créanciers privés ont accepté d’effacer la moitié de la valeur des 200 milliards d’obligations qu’ils détiennent. Courageux de leur part, après avoir entendu ces mêmes gouvernements leur promettre qu’aucune dette publique de la zone euro ne serait jamais rediscutée. Tout le monde a fait des efforts. Maintenant c’est au tour de la Grèce.
Continuer au rythme actuel est non seulement périlleux pour une Europe fragilisée, c’est aussi envoyer un message négatif aux autres pays en difficulté. Le Portugal, l’Irlande, l’Espagne et même l’Italie s’appliquent des remèdes de cheval sans aide aussi massive. Poursuivre les plans d’aide à la Grèce serait perçu comme profondément injuste par ces pays laborieux.
Alors que la dernière saison de la série grecque n’en finit pas, nous devons être clairs. Il n’y aura pas de saison suivante. Si la Grèce ne s’en sort pas après les trois tranches d’aide cumulées depuis 2010, elle devra poursuivre sa route hors de l’euro.
La Grèce connaît les solutions. S’attaquer à la bureaucratie, aux professions protégées et aux réglementations ne débloquerait pas seulement la création de valeur, cela réduirait la corruption qui reste une spécialité du pays. Les 20 milliards de fraude fiscale annuelle ne sont rien à côté du manque à gagner d’une économie largement sous-développée.
Rigidités et archaïsmes plombent toujours l’économie domestique. La voie de sortie de crise se trouve dans l’offensive économique, pas dans un assistanat renforcé auquel plus personne ne croit. Il n’y aura pas de nouvelle sommation si la Grèce veut rester dans l’euro.
*Aurélien Véron (blog) est le Président du Parti libéral démocrate.
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