On apprenait ce 25 janvier que l’Espagne entend inciter les 27 États-Membres de l’Union européenne à l’adoption d’une position commune dans la question du Venezuela. Il s’agirait dès lors d’une pratique plus ambitieuse que celle à laquelle Bruxelles nous a habitués. On doit en effet souligner ici, qu’en général, les États cherchent à y faire prévaloir leurs prérogatives d’une manière beaucoup plus jalouse que ne le croit ou, fait mine de le croire la critique souverainiste. En particulier, pas question de toucher au domaine réservé des bureaucraties diplomatiques. Et, pour s’en assurer le Conseil des États s’est empressé en 2014 de bombarder Haute Représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité une Federica Mogherini, alors tenue pour insignifiante.
Ministre des affaires étrangères espagnol, Josep Borrell, lui-même ancien président du parlement de Strasbourg a cependant tenu à préciser que son pays ne demeurerait pas inactif si un accord unanime européen, indispensable en l’occurrence, n’intervenait pas.
Comme il l’a reconnu lui-même, la question du Venezuela est considérée à Madrid comme une affaire touchant à la politique intérieure. Soyons plus explicite : personne ne peut ignorer, au-delà des Pyrénées, que l’émergence du parti de gauche radicale Podemos remonte au soutien reçu de Caracas à l’époque de la présidence Chavez (1998-2013). Or, ce lien, est demeuré très fort depuis
En Espagne en effet le gouvernement socialiste de Sanchez s’est constitué en juin 2018 par une motion de censure contre le ministère Rajoy. Composé des socialistes espagnols du PSOE et de leurs homologues catalans du PSC, il ne dispose aux Cortès que de 84 députés sur 350. Il ne saurait donc se passer d’une certaine neutralité implicite de Podemos.
Sanchez lui-même se garde donc bien de stigmatiser l’extrême gauche, à la satisfaction symbolique de laquelle au contraire il consent des initiatives qui, pour parler le langage commun de nos adversaires, “ne mangent pas de pain” mais dont l’incidence culturelle et métapolitique ne devrait échapper à personne : refus de prêter serment sur la Bible, projet de transfert des cendres du Caudillo, exhumation des spectres de la guerre civile achevée pourtant en 1939, dénigrement de la Reconquista, etc.
Diplomate plus subtil qu’on pourrait le croire, Borrell, socialiste moins enragé, entend amener la rupture avec Maduro comme venant de l’Europe et non de la social-démocratie espagnole.
Semblent visés, en réalité, le soubassement matériel et le financement de l’extrême gauche. Et, en effet, il s’agit d’un problème qui concerne tous les pays d’Europe, si l’on veut bien prendre en compte les sommes considérables dont disposent les réseaux mafieux issus du chavisme, et pas seulement de la gestion de Maduro plus déplorable encore.
C’est l’ancien président de la Cour suprême de justice du Venezuela, Miguel Ángel Martín Tortabú aujourd’hui en exil à Madrid, qui a donné l’alerte, fin décembre, sur la réalité des finances post-chavistes, la droite espagnole intervenant au Sénat par la voix de Luis Aznar.
Car des sommes considérables sont en jeu.
Certes dans la misère du peuple vénézuélien, tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Maria Gabriela Chávez, la fille de feu Hugo Chavez, est la personne la plus riche du Venezuela. Sa fortune est évaluée à 4,2 milliards de dollars, dont la majorité est placée sur des comptes bancaires aux États-Unis et en Andorre.
Dès 2014, on savait que le train de vie des deux filles de Chavez et de l’actuel dictateur Maduro, coûtait au pays quelque 3,6 millions de dollars par jour[1].
Il ne s’agit pas de situations isolées.
Les documents provenant du lanceur d’alerte Hervé Falciani ont montré qu’Alejandro Andrade, ministre des Finances à Caracas de 2007 à 2010, disposait d’un compte ouvert auprès de la banque HSBC en Suisse sur lequel il avait déposé 11,2 milliards de dollars[2].
Outre la vie de pachas de quelques privilégiés de la révolution bolivarienne[3], les sommes colossales volées au peuple vénézuélien servent au financement de l’extrême gauche en Europe, et, à cet égard, il suffit de lire comment ses bénéficiaires et quelques dupes défendent ce régime pour le comprendre.
Apostilles :
[1] cf. El Comercio
[2] cf. Daily Mail et L’Express.
[3] Au Venezuela on les désigne ainsi comme des “bolibourgeois”.