L’usage des cartes de visite du Nouvel An est apparu assez tard en Europe. Jusqu’au XVIIe siècle, les visites se rendaient toujours en personne.
Vers le milieu du grand siècle, des industriels montèrent diverses agences, qui, contre la modique somme de deux sols, mettaient à votre disposition un gentilhomme en sévère tenue noire, lequel, l’épée au côté, se chargeait d’aller présenter vos compliments à domicile. Un temps vint où le gentilhomme lui-même fut remplacé par la carte de visite dont l’usage devint courant à la fn du règne de Louis XIV.
Pendant la Révolution française, en 1791, la coutume des visites, des cartes et des voeux ainsi que la célébration du Jour de l’An furent abolies, punies de la peine de mort pour quiconque ne se plierait pas à cette décision. Le « cabinet noir ” fonctionnait, ce jour-là, pour toutes les correspondances sans distinction. On ouvrait les lettres à la poste pour voir si elles ne contenaient pas des compliments. Pourquoi cette levée de boucliers ? Le Moniteur rapporte : Il y avait séance à la Convention. Un député, nommé La Bletterie, escalada tout à coup la tribune.
« Citoyens, s’écria-t-il, assez d’hypocrisie ! Tout le monde sait que le Jour de l’An est un jour de fausses démonstrations, de frivoles cliquetis de joues, de fatigantes et avilissantes courbettes… »
Le lendemain, renchérissant sur ces déclarations ampoulées, le sapeur Audoin, rédacteur du Journal Universel, écrivit cette phrase mémorable :« Le Jour de l’An est supprimé : c’est fort bien. Qu’aucun citoyen, ce jour-là, ne s’avise de baiser la main d’une femme, parce qu’en se courbant, il perdrait l’attitude mâle et fère que doit avoir tout bon patriote ! »
Le sapeur Audoin prêchait d’exemple. Cet homme, disent ses contemporains, était une vraie barre de fer. Il voulait que tous les bons patriotes fussent comme lui ; il ne les imaginait que verticaux et rectilignes. Mais enfn le sapeur Audoin et son compère La Bletterie n’obtinrent sur la tradition qu’une victoire éphémère et la mesure fut abolie six ans plus tard, en 1797.
Les pouvoirs offciels ont, par la suite, donné leur consécration aux voeux du nouvel An. Le Président de la République reçoit dans les salons de l’Élysée, l’hommage respectueux du corps diplomatique, des ministres et des grands corps de l’État avant de présenter ses voeux à la nation.
Comment est-on passé de la carte de visite à la carte de voeux ? Tout commença en Grande-Bretagne en 1840 avec l’apparition du premier timbre-poste qui facilita grandement l’échange de courriers. Peu après, la découverte du procédé de lithographie popularisa l’envoi des cartes de Noël, cartes en couleurs décorées de gui, de houx, de crèches ou encore de sapins enneigés. Ces cartes de Noël, que l’on envoyait durant la période de l’Avent, avaient pour fonction de souhaiter un Joyeux Noël à son entourage, mais pouvaient, à l’occasion, servir également à envoyer ses voeux pour la nouvelle année.
La coutume anglaise se répandit dans toute l’Europe, et il devint de bon ton en France, dans les milieux bourgeois, d’envoyer une « carte de Christmas ». On proftait parfois du prétexte des voeux à souhaiter pour renouer des amitiés distendues, se rappeler au bon souvenir de connaissances éloignées géographiquement ou ayant gravi des échelons sociaux.
La carte de voeux telle que nous la connaissons aujourd’hui, c’est-à-dire illustrée et comportant une mention de souhaits, se répandit massivement vers les années 1930. Aujourd’hui, grâce (?) à Internet et ses cartes virtuelles animées, on souhaite la bonne année à des dizaines de personnes d’un seul clic.