Notre société mélange tout. Le plus souvent moins par méchanceté et par dessein que par ignorance. Notamment en matière de religion. La confusion touche particulièrement notre appréhension de l’islam et de ses mœurs. Encouragés par l’ignorance, beaucoup établissent des parallèles entre l’islam et la religion catholique qui sont loin d’être évidents. Dont un qui fait régulièrement surface et qui touche à ce que l’Église a de plus délicat, de plus fin, de plus maternel, à savoir, nos religieuses et leurs voiles riches de signification.
Le voile était entré dans les mœurs et largement répandu en Orient à l’époque de Jésus Christ. La femme était soumise à son mari et le manifestait publiquement par le port du voile. Quand, dans sa première épître aux Corinthiens, Saint Paul vilipende les femmes découvertes, c’est leur insubordination qu’il fustige. En référence au récit de la Genèse, il rappelle : « Ce n’est pas l’homme, bien sûr, qui a été créé pour la femme, mais la femme pour l’homme » (1 Co 11, 9). Le voile n’est requis qu’en signe de subordination, et selon les coutumes de l’époque.
Aujourd’hui, la place particulière de la femme vis-à-vis de l’homme ne s’affiche plus par les vêtements, et le voile n’est plus une prescription.
Une religieuse porte le voile non pas par obligation, mais par choix. C’est un moyen pour elle de s’engager corps et âme dans la lutte spirituelle qu’elle entreprend pour se conformer à la volonté de Dieu. Le voile a pour elle valeur de sacrifice : il n’est pas chose aisée que de se retirer radicalement du monde. Et le sacrifice ne vaut que parce qu’il est libre.
Le voile de la religieuse n’est en rien asservissement de la personne, tout au contraire, c’est l’expression d’une liberté, plus encore, d’une victoire de l’esprit sur le corps. Rappelons ici que le cheminement spirituel de chacun diffère selon le dessein de Dieu, et que le sacerdoce n’est pas l’unique voie de sanctification, tant s’en faut.
Enfin, aucunement la radicalité de cette vocation ne déprécie-t-elle la beauté. Le pape François nous rappelle, dans Laudato Si, que la beauté de la Création est aussi glorification du Seigneur, et que telle est sa finalité. Seulement, comme on peut être amené à glorifier le Seigneur, source de Vie, par le martyr et la mort, on peut de la même manière être amené à glorifier le Seigneur, source du Beau, par le sacrifice de son apparence au monde.
Quand, au vu des traitements infligés aux femmes en banlieues, on comprend que le port du voile dans l’islam repose sur l’incapacité d’apprécier la beauté de la femme sans verser dans le désir, on mesure le gouffre qui sépare la signification du voile islamique de celle du voile chrétien.
Illustration: religieuses fraternités monastiques de jérusalem ©C.BADET-CIRIC