Même la mort peut être écoresponsable. Bois issus de forêts raisonnées et matériaux recyclés et biodégradables ont pris place dans les catalogues des pompes funèbres. « 556 000 personnes sont décédées en France l’an dernier et il faut un chêne de 80 ans pour faire cinq cercueils ! Arrêtons ce massacre ! », s’insurge Martine Saussol, fondatrice du cercueil écologique en carton alvéolé Eco-cerc, homologué pour la crémation. « Plutôt que de brûler un arbre, brûlons des cercueils en carton », de surcroît assemblés à la colle au soja.
« Le terme de carton doit toutefois être nuancé, précise Philippe Martineau, directeur général du Choix Funéraire, deuxième opérateur français du funéraire en parts de marché. C’est un terme un peu trop générique, que l’on assimile généralement à celui destiné à l’usage alimentaire ». Car par cercueil en carton, il faut comprendre cellulose, fibres de papier recyclé ou encore particules de bois. « On ne parle plus systématiquement de bois mais de matériaux qui doivent avoir une résistance au feu et à la pression », explique M. Martineau.
« Lorsqu’on évoque le carton avec les familles endeuillées, elles visualisent un matériau grossier et cela a tendance à les effrayer. » Philippe Martineau, directeur du Choix Funéraire
Si les promoteurs du cercueil en carton estiment que sa durée d’incinération est deux fois plus courte, les services funéraires de la Ville de Paris leur opposent que « le bois du cercueil participe à l’apport calorifique pendant au moins 60 % du temps » de l’opération, ce qui implique, pour ces nouveaux modèles, d’utiliser davantage de gaz, une énergie fossile non renouvelable.
Les convictions écologiques ne sont, bien sûr, pas les seules à entrer en ligne de compte dans la sélection d’un cercueil. « Le choix d’essences nobles, et principalement le chêne, témoigne du respect que l’on porte au défunt. Lorsqu’on évoque le carton avec les familles endeuillées, elles visualisent un matériau grossier et cela a tendance à les effrayer », observe M. Martineau. De plus, le moindre coût d’un tel cercueil – 350 euros en moyenne contre 500 euros pour un modèle en bois d’entrée de gamme – laisse supposer à beaucoup un manque de qualité.
En blanc pour écrire dessus
A l’inverse, il s’agit d’un argument de poids pour les familles au budget plus serré, constate Mélanie Toyos à la tête des Pompes funèbres Toyos à Alès (Gard). « Ça ira très bien pour le peu de temps que cela doit durer », estiment les familles qui ont opté pour la crémation mais seront en revanche regardantes sur le choix de l’urne cinéraire. « Je préfère laisser un peu de monnaie à mes petits-enfants qui n’ont pas de travail plutôt que de mettre des mille et des cents dans un costume en chêne », lui a même confié un aïeul lors de la signature de son contrat obsèques. « Un cercueil en bois ou un cercueil biodégradable en carton alvéolé plaqué bois, on ne voit pas la différence », assurent Mmes Saussol et Toyos.
Le modèle Kraft du fabricant de cercueils en carton personnalisés AB Crémation, lui, ne leurre personne en affichant clairement sa spécificité, aux côtés des modèles floraux, animaliers, automobiles et autres motifs pied-de-poule ou vichy. Le modèle Pureté, « un cercueil en carton blanc », est, lui, pensé pour recevoir les messages écrits des proches du défunt. « Le besoin de s’exprimer s’inscrit dans le travail de deuil, c’est un élément facilitateur, explique M. Martineau. Mais, on ne peut pas tout écrire sur un cercueil, sans compter que tous les lieux de culte n’assumeront pas d’accueillir un cercueil graffé ! » Plutôt rare actuellement, le cercueil en carton pourrait atteindre les 5 % du marché d’ici cinq ans selon ses prévisions.