Christiane Taubira, le retour. Et sur les questions féministes, bien sûr, qui occupent toute l’actualité, car Madame est experte. Paraît-il.
Libération l’a interrogée « à l’occasion de la Nuit des idées organisée à Montréal par l’Institut français », où elle est venue répondre à la question de savoir « quel rôle jouent les femmes dans l’imagination des nouvelles formes de pouvoir, et quid de leur accès aux sphères de ce pouvoir ».
La réponse de Christiane Taubira est très simple : « Le système actuel d’exercice du pouvoir a été pensé par et pour des hommes. » Et elle donne à Libération un exemple absolument criant : « Les graviers de la cour de l’Élysée, ce choix de recouvrement n’a pas été fait par une femme portant des chaussures à talons ! » (sic) Un tel enjeu valait bien de parcourir le globe. Balançons le porc sadique qui a eu le premier l’idée de mettre du gravier à cet endroit : Mouaaaaaahhh ! Avec ce gravier diabolique, elles vont toutes se tordre la cheville, et je serai le maîîîître du monde ! « Bref, avant d’avoir leur place au pouvoir, les femmes n’ont pas d’autre choix que “d’imaginer” un espace dans lequel elles en ont une », explique-t-elle. On les imagine imaginer : que mettre dans la cour de l’Élysée ? Des pavés ? Avec les interstices, c’est encore pire. Une moquette, un lino, un parterre de roses, un tapis roulant ? Pas simple, les filles. Car vous savez comme moi que les talons aiguilles – les autres talons s’accommodent du gravier – ne sont supportables qu’en un seul lieu : balancés aux deux coins du salon, quand on a pu enfin rentrer chez soi et s’en débarrasser avant de se vautrer dans le canapé.
Et que l’on peut tout à fait circuler parfaitement à plat, rien ne nous forçant à en mettre, sauf l’espoir d’être plus belle, élégante séduisante… Attention, alerte rouge, contradiction féministe à l’approche ! Mais si vous croyez que ce genre de détail arrête Christiane Taubira. Elle est bien au-dessus de ça.
Et la dame de continuer : La fragilité féministe est de trop limiter ses combats. » Dans ma vie, j’ai plus souvent été victime de racisme que de sexisme […] si parfois le mouvement féministe a été affaibli, c’est parce qu’il n’a pas su intégrer d’autres revendications extrêmement fortes et puissantes. Il y a certaines personnes qui souffrent plus de racisme que de sexisme » (bis repetita placent) « le facteur le plus fort de rejet est le préjugé racial. Le combat féministe peut entraîner avec tous les autres combats. »
Pour résumer, il faut jouer la convergence des luttes, féminisme et antiracisme, mais entre deux maux, l’un est plus grave. En cas de conflit, comme à Cologne, à Sevran ou à La Chapelle-Pajol, quel camp choisira Christiane Taubira ?
A-t-elle, d’ailleurs, jamais choisi celui des femmes ?
Il eût été une bonne occasion pour Christiane Taubira de prendre à bras-le-corps leur cause. De pratiquer un féminisme constructif, avec de vraies mesures, et non un féminisme récréatif, multipliant les hochets… aujourd’hui le revêtement au sol, hier la couleur du cartable.
Il aurait suffi, quand elle était garde des Sceaux, de se pencher sur le dossier de la sécurité, une société laxiste retournant à la loi de la jungle, et donc à celle du plus fort, mettant d’abord en danger les femmes, spécialement dans la rue et les transports en commun. Il ne se serait pas agi de dénoncer par un hashtag oiseux de faux dragueurs, mais de mettre sous les verrous de vrais violeurs. Et de les empêcher de ressortir par une loi ferme sur la récidive. Tout le contraire de la politique pénale de Christiane Taubira. Anne-Lorraine, Agnès, Laetitia, Natacha, Pascale… ce sont les prénoms de toutes celles qui auraient bien aimé, accédant « aux sphères de pouvoir », trébucher sur les « graviers de la cour de l’Élysée ». Elles étaient femmes et méritaient qu’on les défende. Vraiment. Et il n’était pas besoin d’aller à Montréal pour cela.
Gabrielle Cluzel – Boulevard Voltaire