Ne vous dites pas : « Tiens, encore un livre sur De Gaulle… » Parce que ce n’est pas un livre de plus sur De Gaulle, mais un livre autre. Et d’abord en raison de la personnalité son auteur, Gilles Buscia. Il fut de tous les combats pour l’Algérie française : comités de Salut public en 1958, putsch d’avril 1961, responsabilité de la branche « action » de l’OAS en métropole, etc. Une première fois emprisonné, il va s’évader en 1963. Condamné à mort par contumace, il sera repris en 1965. Et finalement libéré avec nombre des nôtres en 1968 (De Gaulle, malmené politiquement en mai 68, ayant dû manger son képi…).
Ce qu’il n’a jamais digéré, Gilles Buscia, et ce qu’il ne digérera jamais, c’est la légende qui a été fabriquée – au sens fort du terme – autour du « plus célèbre des Français » (si l’on en croit les sondages).
Il dresse dans son essai, atypique quant au fond et à la forme, le bilan des onze années de pouvoir absolu qui virent, notamment, l’Algérie française être bradée dans des conditions d’horreur absolue. De Gaulle se rendant coupable de haute trahison en livrant à un ennemi en armes, mais laminé sur le terrain, une partie de notre territoire, français bien avant que Nice et la Savoie ne le deviennent.
Il écrit : « De Gaulle a divisé les Français, réduit la plus grande France à une figure géométrique, (…) privé notre pays de ses sources d’énergie et semé les germes de l’invasion de la France et celle de l’Europe. »
Le titre de l’ouvrage résume bien le propos : De Gaulle a créé « DE GAULLE » en effet. Avec une ruse machiavélique il a, et déjà avant la Seconde Guerre mondiale, érigé sa statue. Buscia revient ainsi avec raison à sa capture, le 2 mars 1916, en s’appuyant sur l’ouvrage incontournable d’Yves Amiot, La Capture de De Gaulle(1977).
Page après page, références à l’appui, les talents d’illusionniste de De Gaulle sont démystifiés. Certains crieront au sacrilège ? Buscia le sait bien : « Sans doute d’autres, considérant que la légende est désormais bien enracinée dans l’esprit des Français, se diront-ils que ce n’est pas ce modeste ouvrage écrit, non par un historien, ni même par un journaliste, mais seulement par un obscur combattant de l’Algérie française, qui parviendra à à foudroyer Don Juan, déguisé en Commandeur. »
Voire… A force d’enfoncer le clou, à force de refuser de laisser s’installer le mensonge, viendra le temps où la statue s’effritera. Comme dans le conte d’Andersen, Les Habits neufs du Grand Duc, où les courtisans et le peuple effaré croient voir ce haut personnage revêtu d’habits somptueux alors qu’il est nu. Jusqu’à ce qu’un enfant souligne cette nudité, qui éclate alors aux yeux de tous. Comme disait ma grand-mère, assied-toi au bord de l’oued et tu verras passer le cadavre de ton ennemi. Ce n’est qu’une question de temps.
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