https://youtu.be/njM29BE7-t8
Éloge de la terre, le film Regain de Marcel Pagnol, réalisé en 1937, vient de sortir dans une version restaurée. On y découvre son amour inébranlable pour la Provence et, déjà, une critique de la désertification des campagnes.
Le village isolé d’Aubignane, perché sur un plateau de Haute-Provence, ne sera bientôt plus que ruines. Ses derniers habitants sont Panturle (Gabriel Gabrio), un chasseur robuste et bourru, la Mamèche (Marguerite Moreno), une vieille piémontaise un peu folle, et Gaubert (Édouard Delmont), un vieux forgeron. Lorsque Gaubert n’ayant plus de force quitte le village pour rejoindre son fils, la Mamèche demande à Panturle de chercher une femme afin que le village ne meure pas. Pour les diriger vers le village, la Mamèche effraie alors Arsule (Orane Demazis), une misérable jeune femme, et son protecteur Gédémus (Fernandel), le rémouleur itinérant. Arsule abandonne l’égoïste Gédémus qui l’exploitait et s’installe avec Panturle, son nouveau compagnon. Avec l’aide de gens de villages voisins, Panturle et Arsule, unis par leur amour et leur ardeur au travail, vont de nouveau faire pousser du blé…
Un film à la gloire du retour à la terre
Regain est un film français réalisé par Marcel Pagnol en 1937. Il s’agit de l’adaptation du roman de Jean Giono publié en 1930. La réalisation du film a créé une vive tension entre ces deux auteurs, Giono critiquant l’aspect comédie résultant notamment de la présence de Fernandel, alors que son roman était une pure tragédie. On notera le rôle inhabituel de Fernandel qui incarne un personnage malicieux et égoïste. Il vend ainsi la jeune femme pour le prix d’un âne. Pour les besoins du film, Pagnol a fait reconstruire un village à flanc de montagne. Certaines scènes sont particulièrement émouvantes : le don par le vieux forgeron de sa dernière charrue, la vente du blé, la scène finale des semailles manuelles en couple…
Tandis que la première partie du film dénonce la désertification, la seconde montre la renaissance du village et le renouveau de la vie. Bien que tourné en 1937, pendant le Front populaire, ce film prône le retour à la terre, le travail et la famille.
L’œuvre de Pagnol : une ode à la terre provençale
Tout au long de sa carrière de dramaturge, de cinéaste puis d’écrivain, Marcel Pagnol (1895-1974) a ainsi célébré sa terre provençale.
Fils d’instituteur laïc et républicain et d’une couturière catholique, Marcel Pagnol passe sa jeunesse à Marseille. Lors de la Première Guerre mondiale, il est mobilisé puis réformé pour faiblesse de constitution. Enseignant en anglais, il part à Paris. Mais la nostalgie de la Provence l’incite à écrire une pièce marseillaise qui connaît un triomphe : Marius, avec Raimu dans le rôle de César. Le réalisateur Alexander Korda en fait une adaptation au cinéma en 1931. Avec Fanny (1932) puis César (1936), la célèbre trilogie marseillaise enchante la France et l’étranger.
En 1936, Pagnol tourne Topaze (il en tournera une nouvelle version en 1951 avec Fernandel), qui dénonce l’affairisme dans le milieu de la politique. Dans Regain (1937), il fait l’éloge de la terre. En 1940, son film La Fille du puisatier, pour illustrer la victoire de la morale patriarcale et terrienne du puisatier joué par Raimu, contient un extrait du discours du Maréchal Pétain du 17 juin appelant à cesser le combat. Certes, il produit, en 1941, le documentaire Français, vous avez la mémoire courte !, réquisitoire contre le communisme et apologie de Pétain, commandé par le Secrétariat général à l’Information et à la Propagande du régime de Vichy.
Mais sous l’Occupation, directeur de production des Films Marcel Pagnol, il va résister à la pression de la Continentale (société de production française à capitaux allemands). En 1944, chargé de constituer une commission d’épuration, Pagnol défend les auteurs et artistes ayant continué à travailler pendant l’Occupation sans avoir pris de position collaborationniste. Après ses films et pièces de théâtre, Marcel Pagnol entame avec le même succès une carrière de romancier (Souvenirs d’enfance avec notamment La Gloire de mon père, L’Eau des collines avec Jean de Florette…). Il continue ainsi d’exalter sa terre, la Provence.
Kristol Séhec
Regain, DVD 21 euros, Blu-Ray 26 euros. Editeur CMF – Marcel Pagnol Communication.
Disponible sur le site internet marcel-pagnol.com.
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