L’annonce récente de l’inscription de Maurras — qui aurait eu 150 ans cette année — au programme des commémorations du ministère de la Culture pour 2018 provoque une de ces polémiques quasi quotidiennes qui agitent les réseaux sociaux… Tous les censeurs professionnels sont à la manœuvre : Corbière, la LICRA, Valls, etc., et le ministre de la Culture lui-même, Mme Nyssen, se voit contrainte, face à ce déchaînement de raccourcis et de caricatures, de rappeler cette évidence que commémorer un personnage important de l’Histoire et des lettres françaises ne signifie pas adhésion totale à sa personne et à ses écrits !
La vérité est que cette polémique est emblématique de la situation paradoxale de Maurras. Tout le monde, même parmi les demi-habiles et les demi-cultivés qui font la pluie et le beau temps dans le peu qu’il reste de vie intellectuelle française, connaît le nom du maître de l’Action française (plus, éventuellement, quelques citations polémiques et sorties de leur contexte) mais personne, ou presque, n’a lu une seule œuvre de ce géant de notre littérature, auteur de centaines d’ouvrages et de milliers de pages, qui firent les délices et l’admiration de Proust, Apollinaire, Cocteau, Kessel, Malraux, de Gaulle ou même Lacan.
Au fond, que Maurras soit ou non maintenu (il a, semble-t-il, été retiré depuis la rédaction de cet article) à la place qui est légitimement la sienne dans cette liste d’événements ou d’auteurs à commémorer dans le cadre officiel importe peu. Les censeurs pressés et incultes qui se sont manifestés lui ont finalement rendu le meilleur des services en attirant l’attention sur lui au moment où la réédition d’une partie de son œuvre littéraire, politique et critique est annoncée pour avril prochain chez un grand éditeur.
Le vrai public cultivé ira aux œuvres et jugera sur pièces !
Stéphane Blanchonnet – Boulevard Voltaire