Un billet de Cicéron*
Dimanche dernier, je traversais le beau département du Gers en voiture, après un bon repas. Mon épouse conduisait, c’était l’heure de la sieste et je me laissais aller à une douce somnolence, tentant tout de même d’admirer entre mes yeux mi-clos le paysage verdoyant parsemé de maisons de pierre ocre. Soudain, au cœur d’un village, je poussai un cri d’horreur ! Un instant, je crus que je faisais un cauchemar mais le rappel à l’ordre de ma femme, émue par mon hurlement, me prouva que je ne rêvais pas. Sur la bâche protégeant la terrasse d’un restaurant le nom de l’établissement s’étalait violemment devant mes yeux hagards : « Snacking de terroir » ! Quelle honte ! Quel rapprochement incongru de deux mots aussi antinomiques et en plein cœur du pays de la gastronomie du sud-ouest ! J’en ai, aujourd’hui encore, des nausées… Ce réveil brutal me ramena à la triste réalité de notre époque, à l’avilissement de notre langue jusqu’au pays des Mousquetaires, du foie gras et de l’Armagnac. Je passai le reste du voyage à trembler d’angoisse à l’idée que nous n’avions peut-être pas encore tout vu !
*extrait du livre Les maux pour le dire, paru en novembre 2012 aux Editions Atlantis.
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