Retour sur l’accord du participe passé et autres bizarreries de la langue française

Comment redonner goût aux mots, redonner une saveur à l’orthographe et plus généralement redonner l’envie d’aimer la langue de Voltaire? Un français aux règles labyrinthiques et aux multiples pièges bien insidieux, qui a stigmatisé, voire marqué au fer rouge, des milliers de petits et grands à travers les générations.
Après de nombreuses années passées à corriger la prose des journalistes et dispenser les mêmes règles d’orthographe et de grammaire, les correcteurs Martine Rousseau, Olivier Houdart et Richard Herlin ont décidé de publier un ouvrage ambitieux, intitulé Retour sur l’accord du participe passé et autres bizarreries de la langue française. Un livre didactique qui recense les principales règles typographiques, orthographiques, grammaticales à employer pour maîtriser une fois pour toutes le français.

Dans votre préface vous écrivez: «Le vocabulaire a tendance à s’aligner sur la communication d’État». A-t-on affaire aujourd’hui à une écriture du nivellement par le bas?
Martine Rousseau – Oui et c’est bien ce qui nous inquiète. La langue se transforme, le subjonctif s’effiloche, notre vocabulaire s’appauvrit. Ce qui s’annonce est une catastrophe. Il n’y a qu’à ouvrir le journal pour s’apercevoir que l’on a affaire à une langue de communication d’état. On retrouve d’un article à l’autre, d’un média à l’autre, les mêmes termes, la même dépêche, les mêmes tics de langage «bon», «voilà»… C’est dommage.(…)

Ne serait-ce pas aussi parce que les Français lisent moins?
(…) Je pense que la concentration des gens est moindre à cause de tous nos appareils électroniques. Il y a une attention qui s’amoindrit. On répond au tout, tout de suite. Cela résonne presque comme un ordre.

Cette «dictature de l’urgence» et les nouvelles technologies ont-elles fondamentalement changé notre rapport à la langue?

C’est un fait. L’écriture a changé avec l’usage des réseaux sociaux. Twitter c’est le comble. On peut penser qu’avec 140 signes, on va faire le maximum pour synthétiser sa pensée, or on a l’impression, que ça n’a aucune importance. On pourrait écrire en sténo, cela serait presque pareil. De toute façon, on se fait comprendre.
On envoie des messages électroniques sans même les relire. En réalité, tout ce qu’on avait l’habitude de faire sur une lettre a complètement été effacé. On ôte les majuscules, la ponctuation disparaît… Ne pas ponctuer son message, c’est le déconsidérer et ne pas respecter son interlocuteur. Si vous structurez bien votre pensée, vous ponctuez bien.

Alors, faut-il en revenir aux dictées?
Avant il y avait la sacro-sainte dictée. C’était très bien. Mais à quoi sert-elle finalement aujourd’hui? Si c’est pour reproduire ce qui n’a pas été acquis, la dictée ne servira à rien. Elle pointera à chaque fois vos erreurs sans vous expliquer pourquoi vous en faites encore. Et vous savez, on n’a jamais appris à quelqu’un quelque chose en lui donnant des coups de bâtons sur la tête. Enfin, je ne pense même pas que les professeurs soient en cause, ce sont les programmes qui sont rigides. On a dégoûté les enfants de l’orthographe. Comme si bien écrire était une punition…. Alors que c’est une formidable façon de communiquer. La langue, c’est rigolo. C’est un jeu.

Que faire pour lutter contre les fautes d’orthographe?
La lecture est un élément clé. Que vous lisiez le journal, de la littérature, des mangas ou de la poésie, c’est très bien. La poésie, par exemple, permettrait de sortir d‘une langue toute faite, rigide et froide comme la mort. C’est regrettable de voir quelle place il lui est faite. Quand vous allez dans une librairie et que vous cherchez le rayon poésie, il est caché, sur le côté et tout en bas le plus souvent… Alors qu’une langue c’est poétique!(…)

Pensez-vous, comme Michel Zink, que la langue française puisse devenir une langue morte?
Le français risque de s’étioler à cause de la sécheresse du vocabulaire, du rouleau compresseur de l’américain, de la paresse des gens, de l’instantanéité des médias qui ne cherchent plus de synonymes. Mais pourquoi devrions-nous pour parler d’une même chose toujours utiliser les mêmes mots? La langue est riche de ses emprunts. Pas besoin de mettre des frontières entre les langues. Il faut simplement faire preuve d’imagination et ouvrir des livres.

Retour sur l’accord du participe passé et autres bizarreries de la langue française, 17 euros, aux éditions Flammarion.

Source

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Les 19 chapitres qui composent Retour sur l’accord du participe passé et autres bizarreries de la langue française ont pour ambition de passer en revue les principaux problèmes auxquels nous sommes quotidiennement confrontés quand nous devons rédiger un texte. Grâce à ce livre, vous serez en mesure de ne plus vous perdre dans le labyrinthe des règles typographiques, orthographiques, grammaticales…, et vous pourrez plus facilement trouver le mot juste, éviter les clichés ou la tristement fameuse « langue de bois ».

Le français est moins rigide que ce que l’on voudrait nous faire croire. En matière de syntaxe, notamment, la frontière entre l’indicatif et le subjonctif est mouvante. L’orthographe et la syntaxe sortent lentement de la glaciation intervenue au XIXe siècle : les institutions censées les régenter, à commencer par l’Académie française, ont perdu toute autorité. Les règles typographiques, peaufinées avec amour par des générations d’imprimeurs depuis le XVe siècle, ne sont pas des lubies de professionnels sourcilleux, elles ont toutes leur justification : unifier les écritures et faciliter la lecture.

Ainsi, connaissez-vous la différence entre le tiret et le trait d union ? Ou les infinies possibilités de la ponctuation, en particulier de la virgule ?Quant au vocabulaire de la presse et des médias, le terrain de chasse privilégié des auteurs, il a une singulière tendance à s appauvrir et se standardiser, voire à s’aligner sur la communication d’État ou d’entreprise : vous verrez comment il est possible de lutter résolument contre ce dessèchement. Et bien sûr, l’accord du participe passé, avec ses nombreuses particularités, n’aura plus de secret pour vous !

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