“Aucun cas de radicalisation ne s’est produit via les mosquées de France”!

Le nouveau président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Anouar Kbibech, dénonce la destruction de la mosquée d’Auch, intervenue le week-end dernier, et l’attentat dans le Thalys perpétré par un islamiste radicalisé. Il craint «une stigmatisation des citoyens français de confession musulmane» et appelle les musulmans de France au dialogue et à une ouverture avec les non-musulmans.

LE FIGARO. – Quelle est la réaction des musulmans de France après l’incendie de la mosquée d’Auch, qualifié «d’acte volontaire et réfléchi» par le procureur?
Anouar KBIBECH. – Aujourd’hui, les musulmans de France sont sous le choc. La destruction presque intégrale de la mosquée d’Auch est un évènement d’une gravité sans nom. C’est une première en France. Ceci est d’autant plus inquiétant que nous assistons à une hausse alarmante du nombre d’actes islamophobes depuis les attentats tragiques du mois de janvier.
Déjà la mosquée d’Auch avait été offensée au lendemain de l’attaque contre Charlie Hebdo : des lardons avaient été jetés contre la façade. L’incendie de la mosquée intervient cette fois au lendemain de l’attentat dans le Thalys…Je crains un lien de cause à effet.
Le Conseil français du culte musulman et les musulmans de France rejettent tout acte de violence ou de terrorisme, d’où qu’il vienne, commis au nom de l’islam. Ils rejettent tout amalgame et toute stigmatisation qui les viserait en tant que citoyens français de confession musulmane. Cet amalgame met en péril le vivre ensemble et la cohésion nationale.

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Comment lutter contre cette montée de l’islamophobie?
Les politiques ont une responsabilité. Lorsqu’ils parlent de cinquième colonne ou d’une prétendue troisième guerre mondiale… ils contribuent à alimenter un contexte antimusulman. Chacun doit réagir. Les musulmans de France ont aussi un devoir de pédagogie. Pour prévenir les amalgames, ils doivent expliquer les vraies valeurs de l’islam. C’est sur le terreau de l’ignorance que grandit la violence. Il faut déminer le terrain. Il faut informer et expliquer ce qu’est l’islam.
Concrètement, nous allons profiter des journées du patrimoine pour ouvrir les mosquées. Les années précédentes, beaucoup de non-musulmans se sont rendus dans les lieux de cultes qui avaient répondu à cet appel. Au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo, certaines mosquées ont également offert «le thé de l’amitié» pour échanger sur la religion musulmane. Lors de la rupture du jeune du ramadan, certaines mairies avaient aussi organisé des évènements spécifiques. Le CFCM encourage toutes ces initiatives. Nous allons organiser d’autres manifestations entre religions et créer des espaces de convivialité et de dialogue.

Ayoub El Khazzani, l’auteur de l’attaque dans le Thalys, a fréquenté la mosquée radicale de Taqwa à Algésiras, en Espagne. Des établissements de ce type existent-ils en France?
Il faut rappeler que l’auteur de l’attentat n’est pas Français et n’a pas été éduqué en France et, non, ce type d’établissement n’existe pas en France. Aucun cas de radicalisation ne s’est produit via les mosquées de France. Les imams sont vigilants. Nous avons organisé de nombreux séminaires et colloques pour comprendre les sources et le processus de radicalisation et ce travail a porté ses fruits.
Aujourd’hui, nous savons que 90% des cas de radicalisation en France se sont produits via les réseaux sociaux. Ainsi, il faut que nous y assurions une présence afin d’orienter les jeunes qui se posent des questions et éviter qu’ils ne tombent dans les mains de ceux qui dévoient les textes sacrés. Nous menons actuellement une réflexion en ce sens, nous construisons un discours alternatif pour y être présent.

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