Par Ramesh Caussy
En France chaque année près de 11 millions de tonnes de polluants sont émis dans l’air par les activités humaines (industrie, automobiles, activités domestiques, agriculture…).
La question de la qualité de l’air intérieur ressemble étrangement à l’histoire d’une vague qu’on annonce timidement tôt et qu’on voit tragiquement tard, pourtant les premiers dégâts alarmants sont là. En France, le coût annuel de la mauvaise qualité de l’air intérieur est estimé entre 10 et 40 milliards d’euros par an, que les sources proviennent de l’OMS ou de la recherche(1) en la matière.environnement, architecture
Des enjeux colossaux
Le ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie a estimé en 2012 que les coûts de santé de la pollution de l’air extérieure en France s’élevaient annuellement de 20 à 30 Milliards d’euros. Si l’on corrèle à ces chiffres les estimations des conséquences imputables à la qualité de l’air intérieur, les chiffres prennent un poids qui mérite une attention toute particulière.
A une période où chacun s’efforce de regarder les endroits ou des mesures permettraient de réaliser des diminutions de coûts, il semble que des poches existent ou l’on pourrait faire des économies tout en se préoccupant de problématiques de santé publique et en soutenant l’innovation sur des opportunités environnementales : la qualité de l’air intérieur est un candidat sérieux.
Bureaux, maisons, lieux publics… : une problématique critique
Nous passons 90 % de notre temps dans des environnements intérieurs(2), et savons que les bâtiments seront de plus en plus étanches et donc de plus en plus confinés.
Nos modes de production, de consommation et plus simplement d’existence ont évolué, et induisent une altération de la qualité de l’air intérieur. Ce phénomène est la cause de plusieurs milliers de morts(3), mais aussi de dizaines de milliers de malades par an en France.
Les études montrent que 40 % des logements analysés présentent au moins un problème de qualité de l’air intérieur(4), l’asthme frappe 3,5 millions de personnes, les insuffisances respiratoires graves touchent des dizaines de milliers de personnes, les moisissures responsables d’affections respiratoires et allergiques sont présentes dans 37 % des logements, etc. Dans les bureaux, on parle de syndrome SBS (Sick Building Syndrome : des troubles de type céphalées, troubles de concentration, asthénie, irritation cutanée ou des muqueuses nasales, oculaires et des voies aériennes supérieures), de pollutions particulaires(5), ou de troubles respiratoires(6). En ce qui concerne les lieux intérieurs (ex. écoles, crèches, lieux médicaux) la situation n’est guère meilleure. Ainsi dans les écoles, la qualité de l’air est un enjeu prioritaire, notamment pour les enfants, car ils sont plus sensibles à la pollution que les adultes. L’incidence des maladies respiratoires augmente annuellement et l’on sait par ailleurs qu’un environnement intérieur sain peut directement améliorer la santé et l’apprentissage. La problématique centrale est alors claire et mérite un consensus : comment garantir la qualité de l’air intérieur des personnes et des générations futures?
Besoin d’innovations et d’une prise de conscience collective
Les nouveaux entrants sont invités à faire bouger les mentalités et à partager leur créativité et technologie pour accélérer le mouvement.
La recherche, la technologie et l’innovation ont clairement un rôle à jouer. Des acteurs tels que le l’ANSES, l’OQAI ou le CSTB sont en œuvre dans leurs missions respectives, et font preuve de persévérance. Sur le champ des réponses scientifiques et technologiques, le CSTB est ainsi en phase de validation technologique avec des solutions de capteurs ou de robotique de services qui représentent des options nouvelles très intéressantes, aussi bien dans l’identification de causes que du traitement des effets, et de la diffusion des informations.
Pourtant l’essentiel n’est pas encore fait tant qu’une prise de conscience collective forte, de la base jusqu’au sommet du pays, ne sera pas réalisée. Les êtres humains ont besoin d’un air sain sur leurs lieux de vie et de travail. Cela passe par une coopération des tous les acteurs de l’écosystème sur ce sujet trop longtemps géré comme les espèces en voie de disparition : il n’y a plus aucun dauphin de Chine ou de Rhinocéros noir d’Afrique à sauver aujourd’hui…
Les grandes entreprises doivent réagir en adoptant de nouvelles solutions et conditions de travail appropriées, les consommateurs doivent être sensibilités plus activement sur le sujet, et les pouvoirs publics doivent accélérer cette transition qui au final est une opportunité de croissance pour le pays… et les entrepreneurs de l’innovation sont invités à proposer des ruptures conceptuelles ou technologiques pour booster les choses !
(1) Jantunen et al., 2011
(2) CSTB et OQAI : « Qualité d’air intérieur, qualité de vie, 10 ans de recherche pour mieux respirer » 2012
(3) CSTB et OQAI : « Qualité d’air intérieur, qualité de vie, 10 ans de recherche pour mieux respirer » 2012
(4) Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI)
(5) Destaillats et al., 2008; Déléry et Mandin, 2009
(6) Nazaroff et Weschler, 20conomie matin