La colère est le signe qu’à l’ère de l’individualisme, le lien social se forme en priorité à partir des émotions. Quelles sont les raisons qui motivent la colère ? Est-elle positive pour l’homme ? Michel Erman répond à toutes les questions sur cette émotion passionelle en décrivant toutes ses expressions ou incarnations (populisme, vengeance, pamphlet…).Aujourd’hui tout se passe comme si la colère dans ses diverses modalités, qui vont de l’irritation à la haine, irriguait les psychismes de façon valorisante. Le phénomène est récent. En effet, au début des années 2000, on avait tendance à considérer qu’il s’agissait d’une passion aversive, donc quasi interdite et bannie de l’espace social.
Comment expliquer ce basculement ? Que veut donc la colère ? Quelles sont les raisons d’être de cette émotion passionnelle qui semble la plus trouble en même temps que la plus humaine de toutes ? Pourquoi n’est-elle pas soluble dans le moralisme qui la condamne ? A-elle une positivité pour l’Homme ? Telles sont certaines des questions auxquelles cet essai tente de répondre en décrivant toutes sortes d’expressions ou d’incarnations de la colère (populisme, vengeance, pamphlet…)
Par ailleurs, vivrions-nous une époque de mécontentements et de désenchantements permanents ? De nombreuses raisons économiques et culturelles dues à la mondialisation des échanges expliquent, pour une bonne part, les mouvements sociaux d’indignés, voire les colères populistes. Certes. Toutefois la colère touche aussi les rapports interindividuels à telle enseigne que savoir se mettre en colère semble parfois une condition de l’existence dans le monde contemporain.
Nous touchons avec cette émotion, qui est peut-être aussi la plus vieille du monde, à l’opacité des relations humaines entre altruisme et affirmation de soi. C’est cette opacité passionnante que la colère permet d’explorer tout en rappelant un point de vue anthropologique : l’homme n’est pas que raison, c’est d’abord et aussi un être affecté par ces expériences du monde que sont nos émotions.