Il est désormais interdit de discriminer un individu sur la base de critères linguistiques!

Elle est passée inaperçue. La loi de modernisation de la justice, actée en novembre 2016 parmi 115 articles, a opéré un changement sur l’article 225 du Code Pénal. Il est désormais interdit de discriminer un individu sur la base de critères linguistiques. Une première en France.
Le français est-il un discriminant social? Deuxième langue la plus apprise au monde, troisième idiome le plus représenté dans le secteur économique, le parler de Molière jouit d’une aura sans équivoque. Parler français, c’est non seulement partager et propager un héritage historique mais c’est aussi et surtout s’inscrire dans l’avenir. Ce, tels que nous le rappelle annuellement les chiffres de l’Organisation Internationale de la Francophonie.
Pourtant depuis le 18 novembre 2016, date du vote de la loi de modernisation de la justice, cette dernière ne fait plus office de forteresse imprenable dans le Code Pénal. Pour la première fois en France, il est en effet établi comme discriminatoire d’opérer «toute distinction entre les personnes morales sur le fondement […] de la capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français». Comprenez langue étrangère et/ou langue régionale.
Une nouveauté favorable aux locuteurs étrangers qui doit surtout être perçue comme «une avancée et un moyen de lutte supplémentaire contre les discriminations», nuance néanmoins Julien Fournier, avocat au cabinet Pierrat.

«L’article 225-1 du Code Pénal ne remet aucunement en cause la loi de 1992 (le français comme langue de la République, ndlr)», explique Me Fournier éludant ainsi d’éventuels détracteurs. «Justement, elle favorise l’Égalité et ajoute une protection de l’individu dans des cas bien précis.» En l’occurrence, celle-ci permet de sanctionner pénalement toute personne qui refuserait l’entrée d’un individu dans un établissement ou, par exemple, de «vendre un bien», «louer un appartement» ou rendre un service à un citoyen incapable de lui répondre en français. Autrement dit tout employé et/ou fonctionnaire doit aujourd’hui être en capacité de parler français. L’axiome n’est plus réciproque pour le patient, l’usager, l’acheteur ou le vacancier en France.
Seule exception à cela: le champ professionnel. La loi prévoit en effet un aménagement possible s’il est, dans le cadre de l’entreprise, «une exigence essentielle et déterminante» obligeant les employés à manier le français et une langue étrangère. Pas de bouleversement en vue, donc, sur les lieux de travail…
Qu’en est-il alors de l’article au quotidien? Faudra-il se munir d’un traducteur pour se prévenir d’un éventuel préjudice (une infraction pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende)? Rien n’est moins sûr… L’appel à un interprète n’ayant été jusque-là obligatoire qu’en cas de procès ou interrogatoire.
N’y voyons pas malgré cela péril en la demeure de la langue française. Comme le précise Me Fournier, «cette disposition n’entraîne aucune révolution. Elle élargit les critères discriminatoires.»

 

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