L’ancienne villa du ministre de la Propagande du IIIe Reich, Joseph Goebbels, est un fardeau pour son propriétaire, la ville-Etat de Berlin, qui a renoncé à la vendre, de peur qu’elle ne tombe “entre de mauvaises mains”.
(…) “Je crains vraiment que cela devienne un lieu de pèlerinage pour les nazis et je ne pense pas que nous devons prendre ce risque”, souligne la directrice générale du BIM, Birgit Möhring.
L’édifice de plain-pied, perdu au milieu des forêts du Brandebourg, au bord du petit lac de Bogensee, était utilisé par le dignitaire nazi comme “maison de campagne”, “un lieu de retraite loin du tumulte de la ville”, Berlin se trouvant à 40 kilomètres, explique Christian Breitkreutz, responsable de la communication de ce Fonds. C’est la ville elle-même qui avait offert en 1936 le terrain et une première petite maison au ministre. Séduit par l’endroit, il y fit construire une villa plus vaste, grâce aux généreux financements de l’UFA, la puissante société de production cinématographique sur laquelle il régnait en maître absolu.
(…) Aujourd’hui, les grandes baies vitrées, les boiseries, les marbres sont encore visibles ainsi que certaines pièces mais la demeure, attaquée par l’humidité et le froid mordant dans cet endroit isolé, commence sérieusement à se délabrer, faute d’utilisation.
(…) La “villa Goebbels” est d’autant plus encombrante qu’elle vient empêcher toute nouvelle utilisation d’un autre vestige local de l’histoire tumultueuse de l’Allemagne: un vaste complexe érigé après guerre par les autorités de la RDA, l’ancienne Allemagne de l’est, sur le périmètre duquel se trouve la maison.
Au milieu de la forêt, ces bâtiments construits dans le style stalinien du début des années 50 abritaient le centre de formation des cadres de la Jeunesse allemande libre (FDJ, l’organisation de jeunesse du parti communiste est-allemand SED). Y séjournaient également leurs homologues des partis frères du Vietnam, de Cuba, d’Afrique et d’Europe. A l’époque, la “villa Goebbels” faisait office notamment de supermarché pour les étudiants et de crèche.
Au total, les quatre principaux bâtiments construits après guerre représentent quelque 1.400 m2 de chambres, de salles de conférence, d’espaces d’accueil et de réception qui, aujourd’hui laissés à l’abandon, subissent l’inexorable dégradation du temps.
(…) “Ce qui nous intéresse vraiment, c’est que quelqu’un arrive avec un concept intelligent pour reprendre, en location ou en gérance, ces lieux chargés d’histoire”, poursuit Birgit Möhring, évoquant un centre de formation continue ou une structure hôtelière. Des contacts avec des investisseurs existeraient.
Reste le problème de la “villa Goebbels” qui, comme les quatre bâtiments principaux de l’université communiste, est classée monument historique.
(…) Si la protection dont la villa bénéficie est levée, Birgit Möhring entend lui réserver un sort des plus radicaux: une destruction pure et simple.