Caton, une mystification “paraphée” Hollande ! (1983) Déjà…

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“Toutes sortes de versions plus ou moins tronquées, partielles ou partiales ont été données de l’épisode Caton. Je crois être pas trop mal placé pour en parler, étant l’auteur, en 1983, des deux livres signés sous le pseudonyme de Caton : « De la Reconquête » et « De la Renaissance » parus aux éditions Fayard.

En fait, il s’est agi d’un détournement de commande avec l’accord des protagonistes. Flash back : à l’automne 1982, mon ami Jacques Attali, alors conseiller spécial de François Mitterrand, me dit que le président avait pensé à moi pour un livre de politique-fiction qui pourrait sortir à l’occasion des municipales de l’année suivante. En effet, j’avais écrit en 1977, sous le pseudonyme de Philippe de Commines, « Les 180 jours de Mitterrand » qui racontait ce qui se serait passé en cas de victoire  de la gauche aux législatives de 1978. Dans ce cas – à l’époque considéré comme fort probable – Mitterrand aurait été le Premier ministre de Giscard. Le livre fut à l’époque un best-seller. Cinq ans plus tard, je réfléchis ; je n’avais nulle envie de refaire un livre du même genre : on ne se baigne pas deux fois dans le même fleuve. Deux jours plus tard, je propose à Attali un pamphlet où un homme de droite, après la défaite de 1981, fait le bilan d’un an et demi de la gauche au pouvoir, et flingue à la Kalachnikov, la droite qui a permis que cela se fasse. Je trouve le pseudonyme de Caton, le titre « De la Reconquête » et le slogan : « Pour vaincre la gauche, il faudra se débarrasser de la droite ». Je l’écris en octobre-novembre 1982 ; le livre sort en janvier 1983.Une précision à ce propos : « De la Reconquête » démontre bien que le tournant de la rigueur n’a pas eu lieu en 1983 comme le prétend la quasi-totalité des historiens et des journalistes, mais bien en été 1982, quand Jacques Delors annonce « la pause des réformes ». Ce que disait Caton le censeur et le cynique, entre autres, c’est qu’il fallait se débarrasser de ces leaders de droite incapables et que, contrairement aux grands discours mitterrandiens et gouvernementaux, la gauche allait admirablement gérer l’économie de marché, ce qu’elle fit. Le livre devint un best-seller et pendant un an, tout le monde se demandait qui était Caton, devenu l’auberge espagnole des fantasmes politiques de l’époque.

J’avais demandé à Attali que quelqu’un m’aide pour les chiffres : ce fut François Hollande qui travaillait alors, de même que Ségolène Royal, dans son équipe rue de l’Elysée : je rencontrai un jeune homme brillant, plein d’humour, que je vis très souvent dans les dix années qui suivirent. Fin 1983, toutes les radios demandent des interviews de Caton : pas question pour moi d’intervenir, puisqu’un certain nombre de journalistes connaissaient ma voix. J’ai donc demandé à François Hollande de se faire le porte-parole de Caton, ce qu’il fit avec brio. D’où l’allusion à la droite. Mais, je peux évidemment certifier que ni à l’époque, ni a fortiori aujourd’hui, François Hollande ne pouvait être qualifié d’homme de droite. Il s’est agi, tout au long, d’une analyse – la première en date – de la réconciliation de la gauche avec le capitalisme et Caton a eu du succès parce qu’il la décrivait en détail. Tout le reste est « litres et ratures » comme disait Antoine Blondin…”

André Bercoff

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