Vidéo / “Me siffler n’est pas un compliment!”

Un collectif s’est monté à Paris pour lutter contre le harcèlement de rue, ces actes non répréhensibles par la loi et qui commencent souvent par de la drague indésirable. Au menu, tractages et affichages, sur le terrain comme sur le web.

Remarques gênantes, sifflements, insultes… Tous les jours, les femmes, peu importe leur âge ou leur physique, sont confrontées au harcèlement de rue. Il y a deux ans, la réalisatrice belge Sofie Peeters a mis en lumière ce phénomène avec Femme de la rue,un documentaire sur le sexisme ordinaire à Bruxelles.

 En France, des acteurs souhaitent, eux aussi, dénoncer cette pratique. C’est le cas du collectif “Stop harcèlement de rue”, né le 13 février à Paris. Inspiré de son grand frère américain “Stop street harassment”, il s’est fait connaître grâce à une tribune publiée dans Libération, à l’occasion de la semaine internationale contre le harcèlement de rue qui a eu lieu début avril. Un événement relayé dans l’Hexagone alors qu’une étude de l’Insee, datée de 2013 et citée par l’émission Envoyé Spécial sur France 2, révèle que 25% des femmes de 18 à 29 ans ont peur dans la rue et 20% d’entre elles disent se faire injurier au moins une fois par an dans la  rue.

#Stopharcelementderue

“Tout a commencé sur les réseaux sociaux, notamment avec le hashtag #stopharcelementderue”, confie Delphine, 29 ans, membre du collectif et chargée d’étude dans la vie professionnelle. Le hashtag sert à sensibiliser les internautes à la cause ou rapporter des témoignages, même si pour l’heure, il n’est pas encore très répandu.

Un autre hashtag, intitulé #safedanslarue, avait rencontré un beau succès en février et est toujours utilisé. A l’origine, il permettait aux femmes d’échanger sur leur vécu du harcèlement au quotidien. C’est cette initiative populaire qui a motivé la création du collectif. Sur Facebook, la page dédiée à l’organisation rencontre plus de succès et compte actuellement un peu plus de 1000 fans. Mais dans les réunions publiques, seule une vingtaine répondent présents pour l’instant. Parmi eux, des hommes et des femmes, qui ont l’expérience du militantisme ou non, âgés de 20 à 45 ans.

Des slogans chocs pour éveiller les consciences

“Nous sommes parties du constat que la parole individuelle commençait à se libérer mais qu’au niveau collectif, rien n’était fait”, poursuit Delphine. “Notre objectif est d’être dans l’action et de prouver aux gens que chacun peut être acteur dans l’arrêt de ce phénomène.” Tractages, affichages, réunions… Voilà les moyens que se donne l’association pour agir et éveiller les consciences. Leur marque de fabrique? Des slogans courts et expressifs tels que “Ma mini-jupe ne veut pas dire oui”, “Je ne suis pas Ta jolie” ou encore, “Me siffler n’est pas un compliment”.

Mais, est-ce vraiment suffisant pour faire bouger les choses? “Aujourd’hui, il n’y a pas de législation en France sur le harcèlement de rue”, regrette Delphine. “Mais on espère un engagement des pouvoirs publics et des actions de la part des municipalités”. Pour rappel, seul le harcèlement sexuel est puni par la loi et avait fait l’objet d’un long débat juridique. En juillet 2012,une loi a élargi sa définition après que le Conseil constitutionnel avait invalidé le délit au motif que sa définition était trop floue.En attendant un cadre juridique, le collectif propose sa propre définition du harcèlement de rue. “Tout comportement verbal ou non-verbal qui est non-sollicité”, énonce Delphine. Soit les actes qui vont de l’interjection à l’agression physique et qui se répètent, explique le collectif dans sa tribune à Libération. Reste à savoir à quel moment un compliment indésirable devient un vrai problème. “Nous ne sommes pas contre la drague quand elle est respectueuse”, assure encore Delphine.

Une prise de conscience mondiale

La création de Stop harcèlement de rue s’inscrit dans un mouvement plus global: dans de nombreux pays, le harcèlement de rue est également dénoncé grâce à différentes techniques. Aux Etats-Unis par exemple, Tatyana Falalizadeh, une illustratrice basée à Brooklyn, a trouvé un moyen original pour dénoncer cette pratique: afficher des portraits de femmes avec, en dessous, des légendes où ces dernières s’adressent directement aux agresseurs.

En Angleterre, un site, Everyday Sexism, a notamment été créé pour permettre aux femmes de raconter leur propre expérience.

La police des transports de Londres a travaillé avec Everyday Sexism et d’autres associations pour mieux former les agents aux problématiques de harcèlement et d’agressions dans les transports.

La journaliste du Guardian Leah Green s’est aussi servie de témoignages laissés sur Everyday Sexism pour une vidéo où elle reproduit en caméra cachée des comportements de harcèlement de rue sur des hommes (voir la vidéo).Elle explique sa démarche ainsi: “les choses que certains hommes disent aux femmes sont choquantes. C’est triste, mais ce n’est qu’en inversant les rôles qu’on entend à quel point elles sont vraiment incroyables”.

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