Il y a deux choses sur Terre qu’on ne peut arrêter : la mort et le progrès. Mais il semblerait que le second soit en mesure d’arrêter la première. Aujourd’hui, aux Etats-Unis, on discute le fait de guérir la vieillesse. Finie la fatalité ! La vieillesse étant une maladie chronique comme une autre, on a trouvé un médicament qui traite celle-ci comme on traiterait le SIDA. Des chercheurs avaient rendez-vous hier à la FDA (US Food and Drug Administration), un organisme public décidant de la commercialisation ou non des médicaments et produits alimentaires, non seulement pour défendre ce médicament mais aussi la prise en charge de son coût par les assurances santé ! Dans une grande démocratie, l’immortalité ne devrait pas être un produit de luxe mais plutôt de première nécessité…
De quoi s’agit-il ? Une molécule, la metformine, utilisée depuis soixante ans pour soigner le diabète, s’est avérée capable de retarder le vieillissement du corps. Des tests ont eu lieu, on a découvert que les diabétiques soignés avec ce médicament vivaient plus longtemps que les autres, qu’ils soient malades ou sains. D’autres expériences, effectuées sur nos amies les souris, ont confirmé la chose : ce médicament ralentit le vieillissement du corps. Pour le moment, on ne sait pas précisément pourquoi mais on suppose que ça agirait sur les cellules.
Nir Barzilai, physicien de l’Albert Einstein College à New-York, est le chef du groupe qui va se présenter aujourd’hui à la FDA. Ses camarades et lui veulent mettre un place un test sur 3 000 personnes âgées pendant 5 à 7 ans. Ce test, qui devrait coûter 50 millions de dollars, n’est pas encore financé et la décision de la FDA dépendrait en grande partie l’issue de leur collecte de fonds.
Plus généralement, la décision que rendra la FDA risque de bouleverser encore plus profondément l’idée même que nous avons de la médecine. En considérant la vieillesse non plus comme un devenir biologique mais comme une maladie, on ouvre la voie à une nouvelle conception de l’homme. Sommes-nous des êtres soumis à la nature ou sommes-nous capables de nous en affranchir ?
Barzilai et ses collègues se gardent bien de dire qu’ils veulent faire disparaître la mort. Ils savent trop bien que soulever ce débat revient à s’attirer les foudres de tous ceux qui craignent un avenir, chaque jour moins utopique, habité par des post-humains ayant échappé à la finitude. On ne parle donc que de faire reculer la vieillesse, sans dire que c’est une étape obligée sur la longue route vers l’immortalité. En tout cas, aux Etats-Unis, où on peut écoper d’une peine de prison de plusieurs siècles, l’immortalité trouvera son utilité.