Commentant « l’affaire Richard Ferrand », Benjamin Griveaux, le porte-parole de La République en marche, affirme, sur RTL : « La moralisation de la vie publique concerne l’argent public. » Non, Monsieur Griveaux, la morale ne se résume pas à l’argent. Le pouvoir socialiste a cru moraliser la vie publique en demandant aux élus et ministres de dévoiler leur patrimoine, comme un pervers ouvre son imperméable à la sortie des écoles ! Est-ce cela, la moralité ? L’argent, régulièrement gagné – et les déclarations fiscales qui vont avec –, n’est pas immoral, que je sache ! Cette mise en pâture, bien loin d’être un témoin de moralité, excite deux travers de l’homme : la dissimulation forcenée chez les uns, la jalousie narquoise chez les autres.
Les sujets de moralisation ne manquent pourtant pas. Au hasard, et sans limitation :
1) Le pantouflage. Lorsqu’un haut fonctionnaire décide de se faire embaucher par une entreprise privée, il se met aujourd’hui en disponibilité et peut, lorsqu’il le souhaite (dans le délai légal), réintégrer la fonction publique. C’est immoral ! Un salarié du privé peut-il en faire autant ?
2) Le parachutage. On sait que le député ne représente pas sa circonscription, mais la nation tout entière. Cependant, est-il moral qu’un type complètement inconnu vienne se faire élire dans un endroit où il est étranger au seul motif que la circonscription est « gagnable ». C’est pour cela que Gaspard Gantzer, le communicant de Hollande, a été éjecté par les Bretons.
Bravo ! Quid d’une résidence principale de cinq ans dans la circonscription pour s’y présenter ?
3) Les subventions aux associations. Est-il moral qu’une association ne vive que de l’argent public ? Serait-il choquant de dire qu’une association ne peut bénéficier d’un montant total de subventions que dans la stricte limite de ses propres apports (cotisations et autres revenus) ? Au même chapitre, est-il moral qu’une association « touche » de toutes les collectivités – État, région, département, communes -, et ne serait-il pas « moral » qu’un fichier unique, consultable par les contribuables payeurs, recense toutes les sommes accordées à une même association ?
4) Les lois sociétales. La Constitution, notre loi commune, ne peut être modifiée que par référendum ou vote des 3/5e des deux assemblées. Pourquoi la même règle ne s’applique-t-elle pas aux lois dites « sociétales » qui concernent la vie de chacun d’entre nous (fin de vie, mariage homo, GPA, PMA, etc.) ?
5) La virginité pénale. Est–il moral de voir Sylvie Andrieux, ex-députée PS, siéger à l’Assemblée nationale lestée d’un bracelet électronique ?
6) Le politique, une « profession » ? Non ! S’incruster successivement, et à vie, dans tous les rouages de la vie publique n’est pas un moyen de servir la France. Un jour, Jacques Attali a proposé qu’un homme ou une femme ne puisse pas, dans toute sa vie, se présenter plus de trois fois devant les électeurs. Sur ce point, il a raison.
Ce sont six exemples, parmi bien d’autres, qui cristallisent le dégoût populaire envers la chose publique – la « res publica ». Le gouvernement prépare une « loi de moralisation ». Formons l’espoir qu’il ne s’arrête pas aux deux vélos de Taubira (déclaration provocante) et redonne au mot « moralité » son sens plein et entier.
Yannick Chauvin – Boulevard Voltaire