J’aimerais qu’une fois, une seule fois, un responsable politique vienne dire à l’électeur du Front national tout le dégoût qu’il lui inspire. Qu’il lui dise, les yeux dans les yeux, avec toute l’éloquence dont il est parfois capable, que non seulement il se fourvoie en votant de la sorte mais qu’il commet un crime de haute-trahison, une de ses petites lâchetés dont ses enfants et petits-enfants continueront d’avoir honte longtemps après sa disparition.
Lui asséner que voter pour un représentant de l’extrême droite, c’est participer à l’assassinat de la République, c’est d’une façon ou d’une autre contribuer à salir ce que fut la mémoire même de ce pays, c’est permettre à un clan de factieux, sans foi ni loi, d’instaurer un régime dont d’expérience, on sait comment il finira: dans le sang et dans la honte.
Trop longtemps, on a parlé à l’électeur frontiste comme à un enfant malade dont par avance on excusait la conduite: ce n’était pas vraiment de sa faute, il fallait le comprendre, sa vie partait à vau-l’eau, il était avant tout une victime égarée dans un monde devenu trop compliqué pour lui, il n’avait pas vraiment un mauvais fond, il était juste en proie à un énervement, somme toute justifié, qui l’amenait à voter, par désespoir, pour un parti en qui il ne croyait pas vraiment.
Bref, c’était un ange égaré par erreur sur le chemin de l’enfer: il suffisait d’ouvrir grand son cœur pour le ramener dans le droit chemin, le gronder sans le réprimander, le sermonner tout en le cajolant et il finirait, tôt ou tard, par réintégrer le giron de la République.
On a vu le résultat.
Il est grand temps de mettre cet angelot devant ses responsabilités, d’en revenir à des notions aussi désuètes mais aussi essentielles que celles du bien et du mal, abandonner le terrain du sentiment pour celui de la morale: appeler un chat un chat et un salopard un salopard.
Car qu’est-ce qu’un salopard,