Christophe Castaner est à la fois secrétaire d’Etat chargé des Relations avec le Parlement et délégué général de LREM et, à ce double titre, il est chargé du maintien de l’ordre dans les troupes d’En marche, tant à l’extérieur du Parlement qu’à l’intérieur. Ce sont les députés qui lui donnent le plus de soucis. Normalement, il ne devrait guère en avoir puisqu’il a un coadjuteur dont c’est la tâche, Richard Ferrand, président du groupe. Mais lui aussi doit être géré au plus près étant toujours en proie à une affaire de conflits d’intérêts et de favoritisme. Cela distrait Ferrand de sa mission de surveillance des députés, néophytes pour la plupart, qui s’expriment dans les médias sans lui demander son avis et, le plus souvent, pour faire valoir leur mécontentement.
Donc, Castaner a repris la situation en main et a profité de la « trêve des confiseurs » pour sermonner les élus qui ont des états d’âme. Il y a ceux qui se plaignent de côtoyer le seuil de pauvreté, et dont Alain Sanders (Présent du 21 décembre) a fait un sort. C’est le cas, entre autres, de Véronique Hammerer, élue de Haute-Gironde, qui a regretté que son mari ne puisse pas s’acheter de Porsche Cayenne à cause de leur nouvelle situation.
S’ils ne sont pas tous réduits à faire la manche pour arrondir leurs fins de mois, la plupart se plaignent de ce qu’ils doivent travailler trop, le gouvernement leur imposant, paraît-il, un rythme infernal au motif qu’un législateur est fait pour légiférer. Les plus véhéments sont les jeunes qui alertent sur leur vie conjugale et familiale menacée par le stakhanovisme parlementaire. Le député LREM du Rhône Bruno Bonnell voit l’avenir matrimonial de ses collègues compromis : « A Noël, il va y avoir beaucoup d’ultimatums familiaux, genre “si tu y retournes, je te quitte”. On va avoir des surprises en janvier. Il y a un conflit entre la vie familiale et la politique telle qu’elle est conçue aujourd’hui. » Un autre révèle de quoi faire pleurer dans les chaumières : « Mon fils de six ans a demandé pour Noël un chronomètre pour mesurer le temps que je passe avec lui » a déclaré Fabien Gouttefarde, député de l’Eure. « Les vacances familiales de la Toussaint, c’était sans moi. Et à Noël, j’ai encore la tête dans le budget », gémit le député LREM de l’Isère Olivier Véran.
Toutefois, à l’heure où nous écrivons, aucun député de La République en marche n’a encore démissionné pour fuir ces insupportables cadences, à plus de 5 000 euros par mois, au profit d’un paisible emploi de gardien de musée.
Castaner prend mal ces plaintes incessantes, il vient de répliquer dans L’Opinion en fermant le bureau des pleurs : « Etre député et se plaindre de son niveau de vie, c’est inacceptable ! Cependant je peux mesurer que certains députés, qui avaient avant une vie organisée, sont tombés dans un véritable tourbillon. Il convient néanmoins de souligner que le rythme parlementaire n’est pas plus élevé que dans le passé. » Ce qui n’est pas exact et, même si ça l’était, peu importe aux « bleus » : dans le passé, ils n’y étaient pas. Quant à l’avenir, il se peut que les électeurs, compatissants, libèrent ces pleurnicheurs de leur épuisante charge…