e propagande en couleur, en français, trouvable en deux clics sur internet. Le nouveau magazine intitulé «Dar Al-islam», qui fait l’apologie de l’Etat islamique est disponible depuis lundi soir sur le web français. Depuis juillet dernier, existait déjà «Dabiq» le magazine de l’Etat islamique en anglais, diffusé en pdf sur la toile globalisée. Ces deux «revues» sont produites par la mystérieuse agence multimédia Al-Hayat, fondée en mai dernier. Cet organe de la communication de Daech ne lésine pas sur les moyens, diffusant sans complexes sur Twitter sa propagande.
Agrémenté de photos montrant des combattants arborant le drapeau du groupe Etat islamique aux quatre coins du monde arabe (Sinaï, Lybie, Algérie), le premier numéro du magazine est titré «L’Etat islamique étend son territoire». Dans l’introduction, les auteurs se réjouissent d’être «les témoins d’une nouvelle ère», celle de la restauration du califat, qui permet enfin aux musulmans de vivre en adéquation avec la loi islamique.
Le titre vient de la division du monde selon la tradition musulmane entre «Dar al-Islam» ou «domaine de la soumission à Dieu» et «dar al-Harb» le domaine de la guerre, le pays où l’islam doit être apporté. «C’est pour cela que ce magazine se nomme Dâr al-Islâm, pour se rappeler cet immense bienfait qu’est celui de vivre sous la loi d’Allâh, au milieu des croyants.» écrivent les auteurs (les articles ne sont pas signés). «Et pour rappeler à ceux qui n’ont pas accompli l’obligation d’émigrer de la terre de mécréance et de guerre vers celle de l’Islâm qu’ils sont en immense danger dans ce monde et dans l’autre», ajoutent-ils.
Bourrées de fautes d’orthographes, truffées de passages du Coran et de mots en arabe, ces quinze pages de propagande cherchent à convaincre les musulmans français de prêter allégeance au califat. Il insiste sur la nécessité du «tawhid» (la croyance en un Dieu unique) comme dogme absolu ne souffrant aucune compromission, illustrant son propos d’une photo d’un mausolée «impie» détruit par l’Etat islamique.
Les auteurs dénoncent également les «idolâtres»: «ceux qui changent la loi d’Allah», les «démocrates», mais aussi «les croisés qui adorent la croix et attribuent un enfant au Seigneur des cieux».
La dernière image de couverture est éloquente: on y voit un passeport français dévoré par les flammes. «L’objectif du magazine est clair, dès les premières lignes d’introduction: exhorter les musulmans français à quitter la France pour rejoindre les rangs de l’Etat islamique», commente le communiquant, qui se dit «frappé par la maitrise de la propagande» qui se dégage du magazine. «La revue de l’état islamique avait déjà été traduite en Allemagne fin août, on voit clairement que les djihadistes visent les pays au potentiel de recrutement le plus prometteur. Le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne étant les premiers viviers de djihadistes occidentaux», explique-t-il.
Utilisant les codes journalistiques occidentaux (titres accrocheurs, maquette, sommaire, photos…), le magazine a également pour objectif de montrer aux Occidentaux que Daesh s’institutionnalise, en montrant qu’il a un chef ( le calife,) un territoire (qui s’étend), et même une monnaie, qui est détaillée en images.
Interrogé au micro d’Europe 1 sur le magazine ce matin après les événements de Joué-lès-Tours, Dijon et Nantes, Manuel Valls n’a pas su répondre clairement sur la possibilité ou non d’interdire ce genre de propagande sur internet. La lutte contre le cyberdjihad, principal outil de recrutement pour l’Etat islamique, est devenu une des priorités du combat anti-terroriste. La loi Cazeneuve du 13 novembre 2014 durcit les dispositions punissant l’apologie du terrorisme notamment sur internet. Son article 12 prévoit notamment de faire retirer en 24 heures sur décision d’une autorité administrative des contenus appelant à la «la provocation à des actes terroristes ou l’apologie de tels actes». Les décrets d’application ne seront promulgués qu’au premier trimestre prochain, car la Commission européenne doit d’abord en être informée, puis l’avis de la CNIL doit être sollicité. L’interdiction des contenus sur internet ne prendra donc pas effet avant fin février début mars.