Pour une fois, la christianophobie a perdu!

À la retraite, il y ceux qui en profitent pour s’adonner à leurs passions préférées ou découvrir des univers inexplorés. Et il y en a d’autres qui ont de drôle de dadas. C’est le cas de Philippe Bonn. Lui, il traque les croix.

2002 : il enterre son père à Prinçay (230 âmes), dans la Vienne. Quinze ans passent. En 2012 ou 2013, de passage dans la région, il aperçoit dans l’« espace public » au-dessus du portail du cimetière, une croix. Et là, c’est l’horreur ! Trônait-elle déjà, en 2002 ? Il ne s’en souvient pas. Mais parce qu’il se montre « très respectueux de la loi de 1905 » – comme son père – , il se devait donc de faire enlever cet insupportable signe catholique. Pourtant, sur la tombe du défunt, il y a bel et bien… une croix ! Celle-ci ne le dérange donc pas ? Pas du tout, puisqu’elle a été placée là « au nom de l’amitié », dit-il, offerte par un ami intime de son père, un diacre, et qu’elle se trouve dans un « espace privé ». Il y aurait donc croix et croix ; comprenne qui pourra…

Depuis trois ans, ce bon fils passe donc ses journées à écrire des lettres de récrimination, à harceler la mairie, à crier son « attachement » – bien sélectif – à la loi de 1905. Quelle divine passion ! Le maire, qui a d’autres chats à fouetter que de céder aux caprices d’un retraité oisif et obsédé, et ses administrés disent se « sentir agressés dans [leur] culture ». Bah oui, une croix à l’entrée d’un cimetière, ce n’est pas incongru !

Ce fut alors l’émoi au village ! Depuis quand existe-t-elle, cette satanée croix ? Avant ou après la loi de 1905 ? Avant, elle peut rester ; après, il faut la bazarder ! Et le cimetière datant de 1859 – attestation de la préfète -, il était, comme tous les cimetières, orné d’une croix. Qu’en pensent les villageois ? Eh bien, en 2000, ces braves gens que la religion n’intéresse pourtant plus tellement – l’église est quasiment vide, dixit le maire – ont bel et bien plébiscité le remplacement du portail AVEC sa croix.

Quid de toutes celles à l’entrée des cimetières construits après la loi ? Et tous les calvaires de nos villages devront-ils être déboulonnés, eux aussi, comme les églises érigées au-delà de la loi de 1905, en plein espace public ? Tribunaux submergés, tant d’argent public dépensé pour satisfaire la haine anticatholique d’hurluberlus primaires ! Et bientôt, on change la loi et on rase tout signe de chrétienté ? L’anticléricalisme consisterait donc à détruire d’un côté sans rien trouver à redire à ce qui se construit de l’autre ? Le Grand Remplacement d’une religion par une autre, quelle cohérence…

« Quand on s’attaque à quelque chose d’aussi délicat que les signes religieux, c’est un long cheminement », poursuit cependant le très sérieux retraité. Un cheminement qui s’arrête, bien entendu, là où les minarets défient, de plus en plus en nombreux et insolents, nos paysages. Un cheminement qui a abouti – et c’est heureux – par la décision du rapporteur public, début novembre, de « rejeter [cette] demande ».

Sauf que le plaignant, qui ne l’entendait pas de cette oreille, se tournait, cette fois, vers le tribunal de Poitiers. Lequel a décidé de ne pas contrevenir à la loi et a décidé du maintien de la petite croix sur le portail du cimetière.

« Déçu » mais « pas christianophobe », Philippe Bonn hésite à faire appel : il estime avoir « été attaqué par des fous furieux » ! Des fous furieux qu’une croix de 15 cm ne dérangent pas…

Caroline Artus – Boulevard Voltaire

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