En ce mois de novembre est paru le nouveau livre de François Foucart, aux éditions Via Romana : Mes cours d’assises, préfacé par Gilles-William Goldnadel. Chroniqueur judiciaire pour France Inter durant vingt-cinq ans, l’auteur a suivi moult procès retentissants, y compris à l’époque où fonctionnait encore la « Bascule à Charlot » (surnom familier donné à la guillotine sous la Révolution française, en référence au bourreau Charles-Henri Sanson). Dix-neuf affaires sont relatées ici, avec un talent de conteur qu’évoque à juste titre Me Goldnadel (p. 10) ; rire, émotion, colère, etc., ce sont des réactions diverses et variées qui nous viennent en lisant ces pages. Mais l’ouvrage ne se limite pas à cela.
Mes cours d’assises, c’est bien sûr une impressionnante galerie de portraits. Jugez-en plutôt par ces quelques exemples :
* Simone Weber, « la bonne dame de Nancy », petit bout de femme sexagénaire qui assure le spectacle lors de son procès pour meurtre en janvier/février 1991, s’exclamant, tel Gaston Lagaffe, « M’enfin ! » face aux témoins qui lui sont défavorables (p. 95-113) ;
* Tommy Recco, assassin récidiviste issu d’une famille de Propriano décimée par les morts violentes et dirigée par Micheline, une mamma aussi croyante que touchante ; triste sire qui, comparaissant aux assises de Draguignan en juin 1983, clame son innocence et dit être « comme le Christ au Catenacciu » – le chemin de croix en langue corse – ce que goûtent fort peu les familles des victimes (p. 265) ;
* Richard Roman, qu’on pourrait appeler l’intellectuel diplômé devenu agriculteur va-nu-pieds… un drôle d’oiseau que son frère Thibaut qualifie de « catastrophe » (p. 273), qui, à quatre ans d’intervalle, passe du statut de « monstre » à celui d’acquitté du viol et du meurtre de la fillette Céline Jourdan (Grenoble, 17 décembre 1992).
Au crédit de cet ouvrage, notons également les commentaires nuancés sur les procès « pour la Mémoire » (un tantinet sélective, soit dit en passant) ; je parle, bien sûr, du tiercé perdant Barbie/Touvier/Papon (p. 157-216). Du reste, l’auteur a bien raison de dénoncer le terrorisme intellectuel régnant dans le traitement médiatique de certains dossiers judiciaires – voir l’exemple cité page 234 de ce journaliste d’un hebdomadaire de gauche qui, bien que partageant l’opinion de M. Foucart sur la culpabilité du jardinier Omar Raddad dans le meurtre de sa patronne Ghislaine Marchal, refuse de faire une recension du livre qu’il a publié sur cette affaire.
On ne peut que recommander la lecture de ces souvenirs écrits d’une plume vivante et hétérodoxe. Et je terminerai en citant ce beau passage, à la page 78, dans lequel François Foucart évoque le métier qui fut le sien durant un quart de siècle : « Je suis bien conscient du côté voyeur, vaguement malsain, du chroniqueur judiciaire. Il faut alors corriger cela avec le maximum d’humanité, de bon sens : je ne suis pas là pour juger, mais tenter de comprendre, et j’ajouterais que, bien souvent, j’ai eu un vague sentiment de pitié pour le pire criminel parce que je déteste la chasse à l’homme. Et pourtant, il faut juger et le plus souvent condamner à la fois comme réparation et pour écarter de la société un sujet dangereux. »