Connaissez-vous le métier de campaniste ? Ce néologisme recouvre toutes les activités concernant l’installation, l’entretien et le suivi du bon fonctionnement des cloches. Il y a du travail ! Les quelques centaines de campanistes français bichonnent donc les dizaines de milliers de clochers et leurs innombrables et puissantes pensionnaires d’airain que compte la France – il y a environ 50 000 édifices catholiques dans notre pays, dont une bonne partie possède un clocher. Lorsqu’un campaniste met en place de nouvelles cloches, il travaille avec un fondeur de cloches.
Ceux-ci sont beaucoup moins nombreux : une trentaine en Europe, dont seulement quatre en France. Il faut dire que le produit a une certaine durée de vie. Pensez donc, on compte encore au moins une quinzaine de cloches antérieures au XIVe siècle ! Et la plupart d’entre elles sont encore en fonctionnement. Emmanuel, le fameux bourdon de Notre-Dame de Paris au son caractéristique et au poids impressionnant (treize tonnes), a été fondu en 1685. Alors, on comprend que les commandes se fassent rares. Cela dit, rien qu’en Bretagne l’an passé, douze cloches neuves ont été posées. Car, visiblement, les Français tiennent à leurs cloches. Maigre consolation pour une France en passe d’être totalement déchristianisée, mais consolation tout de même. Les cloches sont un des rares signes « audibles » des racines chrétiennes de la France, même si certains laïcards acharnés aimeraient faire taire à tout jamais ce symbole chrétien par excellence : hormis les beffrois du Nord et les quelques pagodes et temples de religions d’Extrême-Orient, il y a peu de clochers et de cloches non catholiques en France…
Comme disait le maire d’une petite commune bretonne : « Pratiquants ou pas, les gens sont attachés aux cloches. C’est notre identité. » En ville ou à la campagne, elles rythment la vie de tous les jours : les heures, l’angélus, la messe, les enterrements… Les cloches ont une fonction pratique, certes, mais elles ont d’abord une fonction spirituelle. Un rituel propre a même été institué, venant du fond des âges, la bénédiction des cloches datant des tout premiers siècles du christianisme (IVe siècle) et le rituel du VIIIe siècle comprenait déjà un exorcisme et une prière de bénédiction. Au cours d’une cérémonie spécifique, l’évêque (et lui seul, sauf délégation) vient bénir les cloches et lui donner un nom de saint – l’expression malheureusement courante de « baptême des cloches » n’étant jamais officiellement utilisée : on ne baptise pas un objet, aussi beau soit-il. Une fois installée, la cloche va remplir son office : appeler à la prière.
Comme le dit le père Henri Favelin, sous-prieur de la Fraternité-Saint-Vincent-Ferrier, communauté qui a eu la joie de bénir les nouvelles cloches de sa future église conventuelle il y a quelques mois, « Le son d’une cloche est un appel à la prière, un appel à venir unir aux harmonies de la musique de la cloche les harmonies de notre âme qui prie et qui s’élève vers le ciel. »
François Bregaint – Présent