En 1982, l’homosexualité cessait d’être un délit en France ; en 1990, l’Organisation mondiale de la santé la retirait des maladies mentales. Les personnes nées en 1964 sont donc devenues majeures après que la société leur a enseigné que l’homosexualité était une maladie mentale et un délit. Si, aujourd’hui, une de ces personnes affirmait ce qu’on lui a appris, elle serait condamnée par la justice.
Jusqu’en 1995, c’est l’Etat qui vendait le tabac, et même, jusqu’en 1972, il distribuait gratuitement des cigarettes aux soldats. Aujourd’hui, l’Etat interdit la publicité pour le tabac et nous fait la morale pour notre consommation tabagique.
En un demi-siècle, une incroyable inversion des valeurs a eu lieu, sur la question de la patrie, de l’Europe, de l’immigration, de l’école, de la sécurité, de l’avortement, à propos des problèmes historiques, etc. Ce qui était interdit est devenu obligatoire ; ce qui était socialement admis se trouve objet de réprobation.
Ce sont ces faits que l’ouvrage La République amnésique, dont une nouvelle édition vient de paraître, rappelle et souligne avec précision.
Parfois, les évolutions peuvent être comprises ou admises : on ne peut pas dire que le tabac soit un produit très sain et qu’il faille encourager. Le plus souvent, ces évolutions sont plus que contestables, voire carrément inacceptables. Nous ne pouvons guère nous y opposer, en raison de notre faiblesse, mais nous ne devons jamais croire que le mal soit devenu le bien, ni que le mal puisse devenir le bien. Et il faut savoir gré à Thierry Bouclier de nous le redire.
Jacques Breil – Présent
- Thierry Bouclier, La République amnésique, éditions TerraMare, 2017, 272 pages, 18 euros.