Comment éviter les contrôles aux aéroports (selon la CIA)!

WikiLeaks publie un manuel de la CIA à destination de ses espions destiné à leur faciliter les contrôles de sécurité. En plus d’avoir révélé l’espionnage à outrance de tous les membres de l’OCDE et d’ailleurs, du téléphone portable de Dilma Rousseff à celui d’Angela Merkel, en passant par les communications entre Jacques Chirac et Philippe Douste-Blazy (dans lesquelles, détail délicieux, les services spéciaux américains commentaient la propension du chef de la diplomatie française « à faire des commentaires inadaptés »), WikiLeaks a mis en ligne un petit manuel savoureux à l’usage des espions en transit pour esquiver ou encaisser les « contrôles secondaires » aux aéroports. En voici quelques bonnes feuilles.

D’après le viatique, les policiers européens ne devraient pas passer plus de vingt secondes à examiner un passeport, avec une instruction de dix secondes « rarement tenue » à Amsterdam. Lorsque vous êtes retenus au-delà de ce temps, la probabilité d’être emmenés en « contrôle secondaire » augmente. Là, vous êtes invités à discuter avec un officier plus chevronné, au moins sommairement formé aux interrogatoires, l’épreuve peut durer plusieurs heures, voire, cas exceptionnels rapportés par la CIA, 24 heures en Turquie, 36 heures en Inde, 48 heures au Brésil. Et l’agence d’ajouter : « Vous n’aurez aucun accès à votre ambassade ou à une assistance extérieure. »

Véritable guide bleu de l’étiquette aéroportuaire, le manuel précise qu’à l’aéroport de Ferihegy de Budapest, les officiers s’intéressent particulièrement aux signes de nervosité observables aux caméras et par les miroirs sans tain. Le grand miroir auquel font face tous les passagers débarquant à la gare de Saint-Pancras, à Londres, est aussi un premier moyen de sélection. La police aux frontières mauricienne s’intéresse quant à elle à l’expression faciale des individus lors de la récupération des bagages, quand la Bahrain National Security Agency semble plus encline à déployer des officiers en civil pour approcher les suspects au plus près.
Signes suspects caractéristiques

Grâce à ce petit manuel, l’espion peut aussi calculer sa probabilité de passer en contrôle secondaire (ou « aléatoire »). En effet, plus il aura répondu « oui » aux questions suivantes, plus le risque sera grand. Avez-vous payé votre billet en cash ? L’avez-vous retiré dans un pays différent de votre pays de départ ? Voyagez-vous sans bagage enregistré ? Avez-vous changé plusieurs fois de file d’attente au contrôle ? Avez-vous longuement observé les fonctionnaires du contrôle avant de choisir votre file ? Les cartes mémoire de vos appareils sont-elles déjà pleines alors que vous avez déclaré un motif de voyage touristique ? Possédez-vous des cartes de lieux non touristiques ? Êtes-vous en bonne condition physique ? Votre coupe de cheveux est-elle compatible avec le port de l’uniforme ? Avez-vous des difficultés avec la langue officielle de votre passeport ? En détenez-vous plusieurs ? Avez-vous une apparence sémite (arabe, moyen-oriental, etc.) ?

Une fois en « secondary », il faut savoir qu’à Addis-Abeba, on s’intéresse particulièrement aux poussières des fonds de poche, alors qu’à Chittagong (Bangladesh), un billet de 50 dollars peut écourter le contrôle. Dans tous les cas, il faut subir un interrogatoire : Où êtes-vous né ? Où avez-vous grandi ? Quel est votre métier ? Où l’avez-vous appris ? etc. Si la couverture de l’espion est directeur marketing, pourquoi n’a-t-il pas de compte Twitter ? Selon une source citée par le rapport, les personnes dissimulant de l’information multiplient les pauses avant de répondre aux questions, ponctuées de « heu », « ah », etc. ; présentent des marques psychosomatiques typiques : sueur, respiration profonde, ajustement des vêtements ; utilisent des adverbes comme « normalement », « typiquement », « souvent », « la plupart du temps » ; donnent des réponses très spécifiques et détaillées… Le manuel indique ainsi de ne jamais donner trop de détails dans un interrogatoire secondaire, car la prolixité est un signe suspect caractéristique.

Au fond, rien de très nouveau sous le soleil. Le plus savoureux étant tout de même l’anecdote qui conclut le mémo : un agent de la CIA, sous couverture officielle (diplomatique), se fait arrêter en Europe pour un contrôle approfondi, motivé parce que ses vêtements ne correspondent pas au standard d’élégance des chancelleries. Son bagage est positif à la détection de traces d’explosifs. Rien de grave : l’agent s’en tient à son histoire de couverture, à savoir qu’il revient d’un entraînement à Washington, et repart comme si de rien n’était. Où ont fini lesdits explosifs en Europe ? Le mémo ne le dit pas…

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