Organe indépendant du Conseil national de l’Ordre des médecins, la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre a estimé que la radiation d’Henri Joyeux, prononcée en première instance le 8 juillet 2016, “n’était pas suffisamment motivée”.
Selon la décision d’appel, les propos du Pr Joyeux “n’excédaient pas le principe de la liberté d’expression”. De ce fait, la plainte contre lui du Conseil national de l’Ordre des médecins a été rejetée.
“Je ne suis pas du tout radié, je n’ai pas de blâme. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que j’ai raison !”, a déclaré le médecin à l’Agence France Presse.
Le 24 mai dernier, Henri Joyeux avait comparu en audience disciplinaire pour plaider sa cause. Le Conseil de l’Ordre avait alors rappelé le motif de la radiation : Henri Joyeux avait “mis en danger la santé publique […] en faisant douter davantage la population de l’intérêt de la vaccination”.
Les griefs se cristallisaient essentiellement autour de deux pétitions publiées sur Internet en septembre 2014 et mai 2015. La première s’élevait contre une recommandation du Haut conseil de la santé publique – jamais suivie par le gouvernement – préconisant d’abaisser de 11 à 9 ans l’âge de la vaccination contre le papillomavirus pour les filles. La seconde fustigeait le remplacement du vaccin DTPolio trivalent (c’est-à-dire protégeant contre trois maladies, la diphtérie, le tétanos et la polio) par un vaccin hexavalent (protégeant contre six affections).
Selon l’instance d’appel, la première pétition “participe de la liberté laissée à tout individu dans un État démocratique d’exprimer son opinion sur un sujet qui le concerne”. En ce qui concerne la deuxième pétition, la chambre disciplinaire nationale a jugé que “la toxicité de l’aluminium comme adjuvant et la dangerosité du vaccin contre l’hépatite B [faisait] l’objet depuis plusieurs années de controverses nourries”.
“Des propos qui ne reposent sur aucune base scientifique”
Lors de l’audience disciplinaire, l’avocat d’Henri Joyeux, Me Jésus, s’était appliqué à démontrer que le professeur Joyeux n’était pas un anti-vaccin, mais simplement “contre les excès”. “Les vrais anti-vaccins disent qu’ils le trouvent mou”, avait-il déclaré. Son client se serait borné à porter à la connaissance du public, “avec des mots simples”, l’existence d’une “controverse scientifique”.
Une position vivement contestée par le représentant du Conseil national de l’Ordre, qui a rappelé qu’Henri Joyeux avait relayé des thèses “sans fondements acceptés par la communauté scientifique” dans le contexte “d’une défiance inédite” des Français à l’égard de certains vaccins – reconnaissant que le Pr Joyeux n’était “pas responsable” de cet état de défiance. En novembre 2017 , les académies de médecine et de pharmacie avaient dénoncé dans un communiqué commun les propos [tenus par Henri Joyeux (et Luc Montagnier)], qui ne manqueront pas d’introduire le trouble chez les parents de jeunes enfants, ne sont pas fondés et doivent être démentis”. Elles s’étaient élevés “avec force contre les propos tenus qui ne reposent sur aucune base scientifique”.
Autre grief formulé par le Conseil de l’Ordre : “Si le professeur Joyeux a le droit d’exprimer une position personnelle, il devait préciser qu’elle n’est pas validée par la communauté scientifique”. “Le public a accès aux informations quelles que soient leur validité, mais pas à la connaissance qui permet de trier le bon grain de l’ivraie”, avait souligné le réprésentant du Conseil. “L’expression de critiques dénuées de nuances” par un médecin jouissant d’une forte exposition médiatique “est délétère [pour la santé publique]”.
Le conseil départemental de l’Ordre de l’Hérault s’était joint à la procédure d’appel, jugeant la radiation d’Henri Joyeux “disproportionnée” et “vexatoire” pour un prévenu de 72 ans, retraité depuis 2014, “qui n’a jamais eu de plainte de patients”.
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