Empêchés d’étudier et de passer leurs examens par une minorité de furieux, nombre d’étudiants n’ont plus qu’un recours : Internet. Idem du côté des présidents d’université dont beaucoup ont décidé de respecter le calendrier des examens en contournant le blocage de leur établissement.
Pas question, donc, d’annuler les partiels : « Sur les 800 examens, on va en avoir 780 en ligne », disait le président de l’université Paul-Valéry de Montpellier à Midi libre, en avril dernier. « Nous savons que beaucoup d’étudiants internationaux avaient déjà prévu de rentrer, si on décale les examens, on les pénalise. Beaucoup d’étudiants français travaillent l’été. Si on avait décalé le calendrier, les jobs d’été risquaient d’être pénalisés. » En foi de quoi les partiels vont ou se sont déjà déroulés via Moodle, une plate-forme sur laquelle les étudiants devront/ont déposé leurs dossiers et compositions.
Devant la nécessité, on voit donc se mettre en place la dématérialisation des examens. Celle des cours a déjà commencé. Les MOOC, pour « massive open online course », ont débuté en 2011 à l’université de Stanford. En quelques mois, tous les grands campus américains ont mis en ligne des cours gratuits en vidéo et lancé des plates-formes s’adressant aux étudiants du monde entier. L’université française a suivi en 2013, adoptant la solution Open edX (initiée par Harvard, le MIT, Stanford et Google) pour proposer des cours sur une plate-forme curieusement nommée FUN, pour « France Université Numérique ».
On nous dit, quelques années plus tard, que les MOOC sont source de désillusions. Beaucoup lâcheraient en route, ne suivant pas le cours jusqu’à son terme. Les étudiants les plus jeunes seraient – là aussi ! – les moins assidus. Beaucoup moins que les 25-40 ans déjà diplômés. « Il faut au préalable avoir appris à apprendre, les MOOC ne sont pas adaptés à tout le monde, ni à toutes les occasions », disait Antoine Compagnon, professeur au Collège de France, dans un entretien aux Échos de 2014. Avis que ne partageait toutefois pas Alain Mille, chargé de mission sur les MOOC au CNRS : « On ne s’inscrit pas à un MOOC comme on s’inscrit à l’université. Certains participants ne vont pas jusqu’au bout du cours, mais quand on les interroge, ils se disent très satisfaits. De plus, différentes études ont montré que le taux de rétention des MOOC était bien plus élevé que celui des formations en ligne classiques. »
Et pour les plus jeunes, comment fait-on ?
On fait de plus en plus à la maison. Enseignement à domicile, « homeschooling » ou « unschooling », comme disent les Anglo-Saxons. Au menu : diversité, épanouissement, pas de levers aux aurores, de devoirs à rendre, d’interros à préparer ni de zéros pointés. Pas de grèves non plus. Le luxe, en somme.
Deux « écoles » sont alors possibles. La première consiste à suivre les programmes de l’Éducation nationale délivrés par le CNED, ce qui n’est qu’une transposition du système général dans un cadre moins stressant. Pour les autres, les privilégiés – car c’est un sacré privilège –, c’est un apprentissage libre, autonome, informel, laissé à la seule responsabilité des parents et au rythme des enfants.
On le sait peu, en effet, mais une éducation hors système est parfaitement légale. C’est l’enseignement qui est obligatoire, pas l’école. Au pays de Jules Ferry, il fait de plus en plus d’adeptes. Aujourd’hui, plus de 30.000 petits Français sont déscolarisés, bénéficiant d’un enseignement qui doit beaucoup au Web et aux réseaux d’entraide.
On me dira que tout cela n’est pas démocratique. Que c’est un gouffre béant où finit de s’écraser « l’égalité des chances », ce fantasme bien français qui nous vaut, aujourd’hui, d’être en queue de tous les classements. Seule question : qu’est-ce qui doit primer, l’avenir de nos enfants ou l’idéologie ?
Marie Delarue – Boulevard Voltaire