“En Corse, ce sont les Corses qui décident de ce qui se fait ou ne se fait pas”!

Après la rixe de Sisco en Corse qui a eu lieu la semaine dernière, Paul-François Paoli revient sur le climat très dégradé qui règne sur l’Île de Beauté entre Corses et Maghrébins.

Cette affaire de Sisco est en effet assez emblématique des fractures ethniques qui travaillent la société française depuis longtemps. En Corse, ces fractures sont à vif parce que les Corses ont un lien quasi-organique avec leur terre et ils sont réactifs quand ils ont l’impression que des étrangers se comportent comme sur un territoire conquis. Le slogan «On est chez nous» scandé par les manifestants qui sont allés dans le quartier de Lupino pour en découdre avec les agresseurs marocains n’est nullement raciste en lui-même. Il signifie qu’en Corse, ce sont les Corses qui décident de ce qui se fait ou ne se fait pas.

Dans les années 70 et 80, il y avait souvent des bagarres entre jeunes corses et jeunes allemands qui, l’été, défrayaient la chronique. Personne ne parlait de racisme. Simplement les jeunes locaux avaient l’impression que les Allemands, nombreux sur les plages à l’époque, se comportaient de manière arrogante. En Corse, le meilleur moyen d’être accepté est d’être discret et de se conformer aux us et coutumes locales. L’arrogance et l’exhibitionnisme, d’où qu’ils viennent, sont mal perçus.(…)

Il pourrait y a avoir un risque de balkanisation si l’Etat républicain qui est sensé détenir le «monopole de la violence légitime» pour reprendre la formule de Max Weber n’assume plus ses fonctions répressives. A quoi bon être strict sur cette question du burkini si des femmes en burka peuvent faire leurs courses sur les Champs Elysées alors que la loi l’interdit? Le port de la burka est beaucoup plus agressif symboliquement que celui du burkini. Il signifie ni plus ni moins ceci: je vis chez vous, parmi vous, mais vous n’avez pas le droit de me regarder alors que j’ai moi-même ce droit.

La vraie raison de la non-intervention de l’Etat hollandais est la peur. L’Etat hollandais a peur des troubles qui pourraient s’ensuivre si les fonctionnaires de police faisaient respecter la loi à Marseille, à Roubaix ou en Seine-Saint-Denis. En Corse, cette faiblesse de l’Etat est très mal perçue. Les Corses n’ont pas envie de recevoir des leçons de morale antiraciste et des cours de valeurs républicaines venant de gens qui ferment les yeux depuis si longtemps sur ce qui se passe dans ces quartiers où les salafistes sont comme des poissons dans l’eau. Et l’on comprend, du coup, pourquoi le récent communiqué du FLNC contre les islamistes n’a guère soulevé de protestation en Corse. Si L’Etat est défaillant dans la lutte contre l’islamisme, d’autres s’en chargeront.

Paul-François Paoli

Chroniqueur littéraire au Figaro et essayiste. Il a publié dernièrement Quand la gauche agonise (éd. du Rocher, 2016).

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