Savez-vous que la fête des Mères fut instaurée par une loi du 24 mai 1950 ? Elle précise, en son article 1er, que « la République française rend officiellement hommage chaque année aux mères françaises au cours d’une journée consacrée à la célébration de la “fête des Mères” ». Mais la tradition est bien plus ancienne. Les mères étaient déjà célébrées dans l’Antiquité, où l’on rendait hommage à la déesse de la maternité. Il vaut la peine de faire un petit tour historique pour s’étonner que quelque esprit, prétendument « éclairé », n’ait pas encore contesté cette fête.
Il y aurait, pourtant, bien des raisons de le faire pour qui veut être dans le vent. Tenez ! Le mariage pour tous, adopté en mai 2013, qui a permis aux couples homosexuels de s’unir devant le maire : vous vous souvenez du débat récurrent sur les dénominations de parent 1 et parent 2 ? Il est surprenant que personne n’ait demandé que la loi de 1950, toujours en vigueur, soit modifiée pour s’adapter aux évolutions sociétales. Justement ! Dès juin 2013, une école primaire a décidé d’instaurer une « fête des parents » à la place de celle des mères. Voilà qui est moderne !
Ce n’est pas tout. La célébration des mères de famille, c’est aussi la célébration de la famille. Quand elle est nombreuse, elle suscite parfois l’étonnement ou la dérision. N’a-t-on pas entendu un politicien déclarer : « Présentez-moi une femme qui a décidé, tout en étant instruite, d’avoir 7, 8, 9 enfants. » Voulait-il dire que les mères de familles nombreuses sont incultes et irresponsables ? Eh bien, dans la seconde moitié du XIXe siècle, des associations, inquiètes de la baisse de la natalité en France, envisagèrent la création d’une journée officielle pour honorer publiquement les pères et mères de familles nombreuses. Émile Zola se mit même de la partie.
Après l’hécatombe de la Première Guerre mondiale, la fête des Mères va connaître un regain. Le gouvernement d’Aristide Briand la célèbre, en 1926, sous le nom de « Journée des mères de familles nombreuses » et instaure la remise des médailles de la Famille française. Mais c’était un homme de gauche, ce qui lui vaut l’indulgence. Ce n’est pas le cas du maréchal Pétain qui, en 1942, invita tous les Français à célébrer la maternité, s’adressant en ces termes aux femmes : « Vous seules savez donner à tous ce goût du travail, ce sens de la discipline, de la modestie, du respect qui font les hommes sains et les peuples forts. Vous êtes les inspiratrices de notre civilisation chrétienne. » Certains le lui reprochent encore !
On comprend donc que cette célébration des mères de famille donne de l’urticaire à une partie de nos contemporains, qui ne s’y reconnaissent pas, encore qu’elle ait beaucoup perdu de sa signification passée. Il suffit de voir les publicités à la télévision pour comprendre qu’elle est devenue, comme la Saint-Valentin, l’occasion de faire du business.
Mais ceux qui croient encore en la famille traditionnelle et au rôle irremplaçable de la mère préféreront revenir aux sources de cette fête et se remémorer ces poèmes que les enfants des écoles primaires récitaient autrefois à leur maman : « Il y a plus de fleurs / Pour ma mère, en mon cœur, / Que dans tous les vergers ; / Plus de merles rieurs / Pour ma mère, en mon cœur, / Que dans le monde entier ; / Et bien plus de baisers / Pour ma mère, en mon cœur, / Qu’on en pourrait donner. ». Et si Maurice Carême vous paraît trop mièvre et que vous voulez faire plus moderne, vous pouvez toujours écouter Avant qu’elle parte, de Sexion d’assaut.
Philippe Kerlouan – Boulevard Voltaire