Migrations et révolte dans les musées parisiens!

Au moment même où les riverains des places de la République et de Stalingrad doivent subir les campements qui leur sont imposés, des architectes, des anthropologues et des sociologues réunis en comité scientifique organisent dans le cadre prestigieux de la Cité de l’Architecture et du Patrimoine, une exposition qui vaut son pesant de cacahuètes.

Son titre ? « Habiter le campement » ou comment conduire une réflexion sur les notions de l’habitat sédentaire, qui implique une pérennité, et de l’habitat nomade (et donc du campement) qui suppose, par définition, un état provisoire. Le tout sous-tendu par l’éloge du nomadisme, encensé en son temps, par Jacques Attali, pour lequel les sociétés déclinent quand elles se ferment aux nomades. On voit le brillant résultat de l’ouverture des frontières aujourd’hui…

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Un nomadisme imposé
Concoctée depuis plus d’un an par ses organisateurs, financée par les grands du BTP comme Bouygues ou Algeco, lesquels peuvent toujours rêver d’une construction en dur à Calais ou au Bois de Boulogne, cette exposition n’est ni plus ni moins qu’une mise en condition du péquin moyen à seule fin de lui faire accepter des hordes de migrants dans les années à venir. Le tout orchestré par des experts qui veulent imposer la vision d’un nouvel urbanisme et de nouvelles sociabilités. Question sociabilité d’ailleurs, ils vont avoir du mal à vanter le vivre-ensemble aux Parisiens qui doivent cohabiter avec des « campeurs » indésirables.

Composée de six typologies de campements-nomades, voyageurs, infortunés, réfugiés, conquérants et contestataires, l’exposition propose en fait, à travers des reportages photographiques et une scénographie inédite, un éclairage très orienté qui fait la part belle aux migrants, qu’il s’agisse de la jungle de Calais, des squatters du métro La Chapelle, des camps de Roms en plein Paris, des réfugiés de Lampedusa ou de Lesbos. Sans oublier les indignés espagnols ou les militants antiG8 photographiés en pleine action destructrice. Des commentaires « scientifiques », des analyses graphiques et une interview de chacun des membres du conseil scientifique de l’exposition finissent de donner à cet ensemble la caution nécessaire pour que le visiteur moyen puisse croire à la justesse de l’ensemble. Ils ont même pensé aux enfants puisqu’un atelier ludique permet aux gamins de construire une tente et « de faire de l’architecture sans le savoir », comme l’indique le dossier de presse.

Un drôle de pèlerin
Principal artisan de cette exposition, l’anthropologue Michel Agier n’a jamais caché son militantisme pour l’ouverture des frontières aux migrants, son soutien actif au MRAP et son engagement au sein de l’association Migreurop, proche des réseaux Soros. Au cours de l’été 2015 il a dressé la liste des dix raisons d’ouvrir les frontières. Il martelait que l’invasion est un fantasme, la liberté de circulation un droit pendant que l’hospitalité doit être mise au centre de la politique d’accueil. Solidaire de Bouygues et d’Angela Merkel, il affirmait également que l’ouverture des frontières permettrait de développer le potentiel économique de nos différents pays. Très impliqué dans le fonctionnement de la jungle de Calais qui fait partie de ses terrains de recherche au même titre que le camp palestinien de Sabra et Chatila au Liban, il plaide pour que les clandestins de Calais soient logés « dans des “maisons de migrants” où l’hospitalité se fait sans condition de statut juridique ou de nationalité, comme une nouvelle étape de la mobilité » (Le Monde du 14 février). Faut-il se demander ce qu’il pense de Paris comme laboratoire d’expérimentation des « maisons de migrants » comme alternative au campement ? On est en droit de se poser la question au moment où Anne Hidalgo et son adjoint communiste Ian Brossat veulent implanter des migrants au bois de Boulogne en les faisant passer pour des SDF.

Les révoltes grondent… au Centre Pompidou
A quelques encablures de la République, devenue le dépotoir de toute une faune d’inoccupés et de professionnels de la palabre, le musée Pompidou organise un festival intitulé « Hors Pistes ». Cette année, le thème est particulièrement bien choisi comme si ses responsables et ceux du Musée de l’architecture et du patrimoine s’étaient donné le mot. Le sujet ? Le combat citoyen comme terrain d’investigation. Autant dire que Podemos et les différents mouvements Occupy à travers le monde (New York, Hong Kong, Taïwan) sont les héros de la fête, sans oublier des projections de films sur les parcours erratiques de jeunes migrants dans Paris ou la contestation des anarchistes de la place Exarchia à Athènes.

Au programme également, des ateliers sur l’art de la révolte, des cours de guérilla jardinière (histoire de continuer le dépavement de la place de la République) et la projection régulière des cinétracts, petits films de trois minutes tournés par Godard ou Resnais et qui avaient pour fonction d’inciter les spectateurs à prendre part à la lutte politique de mai 1968. Le tableau serait incomplet si l’on ne citait pas la mise en place d’une bibliothèque citoyenne et participative. Une bibliothèque sauvage qui, selon le vœu des organisateurs, permettra à chacun d’apporter son livre coup de cœur. Parmi les auteurs cités dans le dossier de presse, figurent Orwell, mais aussi Thomas Piketty… et Christiane Taubira ! Bref, tout ce qu’il faut pour nourrir les nuits de la place de la République et mettre ainsi au point une interactivité de choc. Pour le plus grand bien des amis de Mélenchon.

Francoise Monestier – Présent

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