La candidature de Nîmes pour figurer sur la liste du patrimoine mondial avance. Une première étape a été franchie en janvier dernier, avec l’avis positif du comité national des biens français du patrimoine mondial. On ne peut que soutenir ce projet : Nîmes est une ville millénaire, abritant pas moins de cinq cents monuments historiques dont plusieurs joyaux de l’art antique.
A l’origine, cette liste est le résultat louable d’une prise de conscience de la valeur du patrimoine, d’un point de vue historique, artistique, culturel et social. L’un des éléments fondateurs ayant été le sauvetage des temples d’Abou Simbel en 1964, menacés par la construction du barrage d’Assouan. Il faut d’ailleurs rappeler le rôle essentiel dans cette action de l’égyptologue française Christiane Desroches-Noblecourt.
Etablie par l’UNESCO, la liste est censée réunir des sites ayant une valeur universelle et répondant à l’un des dix critères proposés, tels que « représenter un chef-d’œuvre du génie créateur humain » ou « apporter un témoignage unique ou du moins exceptionnel sur une tradition culturelle ou une civilisation vivante ou disparue ».
Assez restreinte à ses débuts en 1978, il faut reconnaître que depuis quelques années, la liste du patrimoine mondial perd de son intérêt. La cause ? La prolifération des sites inscrits : plus de mille à ce jour. Lorsque tout est considéré comme « exceptionnel », rien ne l’est vraiment. La cathédrale d’Amiens ou la basilique de Vézelay côtoient donc désormais le centre-ville du Havre ou les climats du vignoble de Bourgogne (sic). Plus étonnant : les fameux Bouddhas de Bâmiyân appartiennent toujours à cette liste : ils ont été dynamités par les talibans en 2001… Plus absurde encore, les tombeaux des rois du Buganda, en Ouganda ont été détruits par un incendie en 2010. Ils ont été reconstruits à l’identique… et sont toujours classés !
Le comble de cette inflation est sans doute à trouver dans la liste du patrimoine culturel immatériel. Depuis 2008, pas moins de 391 pratiques sociales ou savoir-faire sont inscrits. Et là encore, on a l’impression qu’au final, tout fait social ancien et codifié peut être considéré comme exceptionnel, du « café arabe, un symbole de générosité » aux « dessins sur le sable de Vanuatu ». On peut légitimement s’intéresser à ces sujets comme je m’intéresse au rite de la pluie chez les Kalash du Chitral et à l’utilisation de la gamme naturelle dans les gwerziou bretonnes, sans pour autant les ériger en patrimoine universel du génie de l’humanité.
François Brégaint – Présent