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Il y a quatre ans, le 17 décembre 2011, mourait Kim Jong Il, le deuxième représentant de la dynastie qui accable depuis plus de six décennies, 25 millions de Coréens. Lui succéda alors, Kim Jong Eun, son troisième fils, un jeune homme de moins de trente ans. Désigné quelques jours après par le Rodong Shinmun, le journal du parti unique, «commandant suprême de l’armée» (cette promotion fut confirmée le 30 décembre 2011 par le Bureau politique), il avait été appelé par le même organe de presse, le 26 décembre, «chef du Comité central».
Mais ne nous attardons pas sur les voies impénétrables du centralisme démocratique à la sauce nord-coréenne et arrêtons nous sur le bilan de ces quatre années de pouvoir du dernier représentant de la famille Kim.
Après l’espoir suscité par certaines manifestations de modernité – il s’était en effet affiché aux côtés de sa femme, puis avait posé entouré de personnages de Walt Disney – il fallut vite déchanter: le jeune dirigeant s’avéra vite très dangereux, même pour son entourage. Le 12 décembre 2013, le monde apprenait qu’il avait fait exécuter son propre oncle, vice-président de la très importante Commission nationale de défense. On raconta à l’époque qu’il le fit dévorer par des chiens furieux. La fermeture du pays est telle qu’elle permet le développement des rumeurs les plus folles et notamment de celle-là. Mais décider de l’exécution de son oncle en usant d’un canon antiaérien à quatre tubes ne manque pas non plus de perversité ni de férocité. En quatre ans de pouvoir, ce sont 130 hauts cadres du parti, de l’armée et du gouvernement qui ont été fusillés! Outre Jang Song Tek, le tonton flingué, mentionnons notamment Heun Yong Chol, alors Ministre des armées.
Ce n’est sans doute pas fini: la politique de terreur se poursuit au point que les cadres du parti, de l’armée et du gouvernement ont perdu toute ambition! Ils savent mieux que personne qu’il est périlleux de s’approcher du sommet du pouvoir! La peur viscérale que Kim Jong Eun répand autour de lui révèle ainsi une faiblesse bien différente de ce que renvoient les images souriantes et sereines de la propagande officielle.
Sous le règne de l’inquiétant Kim Jong Eun, les camps de concentration perdurent et la chasse aux informations venues de l’étranger reste active. Ont ainsi régulièrement lieu des arrestations et des exécutions de Nord-Coréens trouvés en possession de DVD ou de clefs USB contenant des images, des textes ou de la musique venus de Chine ou de Corée du Sud. La surveillance des frontières s’est même accrue depuis quatre ans.
Dans ce monde totalitaire au sommet duquel trône ce dernier, parler de droits de l’homme n’a tout simplement pas de sens. L’article 9 de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 selon lequel Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ou exilé? Bafoué!
L’article 10 sur le fait que nul ne peut faire l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance? Ignoré!
L’article 13 selon lequel «toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat? Refusé!
L’article 18 («Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion)? Ridiculisé!
L’article 19 affirmant que «tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions»? Rejeté! Tout comme l’est l’article 20 («Toute personne a droit à la liberté de réunion et d’association pacifiques. Nul ne peut être obligé de faire partie d’une association»).
Inutile de continuer. L’idée même de droits de l’homme est impensable dans un tel système totalitaire. Mais Kim Jong Eun fait mieux encore pour maintenir la Corée du Nord dans l’anormalité: prétendant se doter d’un armement nucléaire et en même temps réussir le développement du pays en s’appuyant sur un système d’un autre âge, il inquiète ses voisins et la communauté internationale et exagère de plus sa puissance militaire en se prétendant doté de sous-marins lanceurs de missiles ainsi que de la bombe H. Pendant ce temps, la population des campagnes et des petites villes est frappée par la disette.
Faut-il attendre que la Corée du Nord maîtrise la miniaturisation des têtes nucléaires et se dote effectivement de missiles intercontinentaux? Ou qu’elle vende des engins de mort à des groupes terroristes? Faut-il laisser toute une population d’êtres humains privée totalement de liberté et frappée de pénuries sans réagir?
Les Etats doivent coordonner leurs efforts pour que la Corée du Nord réforme son mode de production, abandonne ses projets militaires nucléaires, s’ouvre au monde extérieur et cesse enfin de considérer le respect des droits de l’homme comme une ingérence agressive de «l’impérialisme» et non comme la base d’une relation pacifiée avec le reste du monde.
Vœu pieux? Kim Jong Eun doit savoir qu’il ne pourra continuer longtemps à réprimer comme il le fait sa propre population. Elle veut vivre, commercer et s’informer librement. Et une partie d’entre elle a d’ailleurs commencé à le faire, malgré les dangers.
Le n°1 du Parti/Etat nord-coréen attend-il que la machine explose ou qu’une révolution de palais le balaye ou bien est-il capable de prendre une nouvelle voie après quatre années de malfaisance?