L’histoire du château de Lourdon, qui fut un des plus importants de Bourgogne, est étroitement liée à celle de l’abbaye de Cluny pour laquelle il a été un lieu d’exercice d’un mélange de domination et de protection. Dès l’origine, il la protégea contre les prétentions de ses belliqueux voisins et lui servit constamment de refuge pour mettre en lieu sûr ses biens les plus précieux : reliquaires, pièces d’orfèvrerie, cartulaires, précieux manuscrits appartenant à l’une des plus riches bibliothèques de la chrétienté.
Le premier texte concernant le site de Lourdon date des Carolingiens (888) et fait état d’une vente “in castrum publice”. Des fouilles permettraient, peut-être, de savoir s’il y a eu des occupations antérieures.
En 910, Lourdon est inclus dans la donation faite au moine Bernon pour la fondation de l’abbaye de Cluny. A partir du Xème siècle, Lourdon devient donc la résidence fréquente des moines; c’est un lieu de signatures d’actes (140) d’achats, ventes, donations, échanges et en période trouble, un lieu de refuge et de protection de leurs richesses.
Vers 1093, Lourdon est élevé au rang de doyenné, domaine agricole et lieu de récupération de redevances ; Lourdon est alors le principal fournisseur de l’abbaye en blé et en vin.
Mais à partir du XIIe siècle, Lourdon fut une place forte convoitée et la domination monacale qu’il symbolisait entraîna des attaques. Lourdon, mal défendu par des moines qui n’ont pas de garnison permanente et ignorants des ruses de guerre fut pris et pillé de nombreuses fois:
1166 Lourdon est pris par le comte de Chalon (Guillaume I) avec l’appui des seigneurs de Brancion. Philippe Auguste vint en aide et un traité fut signé en 1180.
En 1250, pour contraindre l’abbé de Cluny à payer la décime, indemnité des frais occasionnés par les croisades, le bailli de Macon jeta ses troupes sur Lourdon qui fut occupé jusqu’en 1252.
Deux siècles plus tard, lors des luttes entre Charles le téméraire et Louis XI, le château est occupé en 1470 par les troupes de ce dernier puis en 1471 par les soldats bourguignons aidés par Claude du Blé.
Remis en possession de leur château, les moines restaurèrent leur bien dont le donjon, sous l’abbatiat de Jean de Bourbon. Ils construisirent aussi de nouveaux bâtiments.
Lors des premières guerres de religion, le château de Lourdon servit à la sauvegarde des trésors de Cluny en 1562 et 1565. Mais il fut pris et pillé par les huguenots en 1574, qui l’abandonnèrent en ruine en 1576.
L’abbé Claude de Guise (1555-1612) restaura le château et y fit d’importantes constructions, notamment le jeu de paume qui porte ses armes avec le millésime 1586, les écuries et le parc. Il fit réaliser le gros canon, actuellement au Musée des Invalides. En 1586, l’état du château est le suivant : un parc de 12 hectares ceinturé par 12 tours et une petite chapelle, une place forte intérieure protégée par des tours dont un donjon de 18 mètres de diamètre, un logis abbatial, jeu de paume, écuries.
Les troubles religieux reprennent en 1589. Claude de Guise s’engagera du côté de la Ligue. Le château repoussa une attaque en 1593 et ne se rendit aux troupes royales qu’en 1595. Il était encore en bon état en 1600 puisqu’il accueillit un chapitre général de l’ordre de Cluny.
Le château était considéré comme une forteresse dangereuse pour la région. Dès la mort de Claude de Guise (1612), l’évêque de Mâcon sans doute également désireux de supprimer ce symbole de la domination clunisienne, s’empresse (1613) d’adresser au roi une lettre : « … la dite démolition est très importante pour le service du roi et très utile pour la Bourgogne, d’autant que le dit château est très fort, qu’on ne saurait l’avoir qu’avec une armée et à force de canon…il peut ravager tout le pays étant entre les rivières de la Loire et de la Saône ; que la garde en est mal assurée entre les mains de religieux… ».
L’accord du roi pour la démolition est donné en 1614. Richelieu, alors abbé de Cluny, exigea 60 000 livres de dédommagement.
Le château est démoli en 1632 par des mines en préservant volontairement la salle d’appârat de Jacques d’Amboise, le jeu de paume, les écuries. Ces restes ont été sans doute utilisés comme bâtiments agricoles au profit des moines jusqu’à la révolution. Puis les vestiges de la puissante forteresse sont vendus comme bien national en 1791.
Restés dans la même famille depuis, ils ont été confiés par un bail emphytéotique à l’Association Castrum Lordo en Juin 2013.