Au Capitole de Toulouse, l’Italien Stefano Vizioli ressuscite “Le Prophète”, du “Rossini allemand” Giacomo Meyerbeer (1791-1864), un opéra très politique, dénonciateur du fanatisme, qui trouve toute sa résonance dans le monde actuel.
“Nouvelle Jérusalem”
Surgissant des blés jaunis par l’été, trois figures lugubres aux longs manteaux noirs viennent perturber le paysage bucolique. “Ces beaux châteaux, ils vous appartiendront. La dîme et la corvée, elles disparaîtront”, promettent aux paysans les trois anabaptistes, ces chrétiens opposés au pape et prônant un baptême volontaire.
“Aux armes”, chante alors le peuple, fourches et fléaux brandis. Mais chaque révolution doit avoir son prophète. Ce sera Jean de Leyde, décident les anabaptistes, voyant le ferment d’un rebelle dans cet amoureux dont la promise a été embastillée par le comte local.
Jean devient “le messie qui brise les fers” du peuple, avant de réaliser qu’il a servi de marionnette à l’instauration d’une des dictatures religieuses les plus sanglantes de l’Histoire. De 1534 à 1536, Jean de Leyde instaure à Münster, en Allemagne, la “Nouvelle Jérusalem”. Se proclamant roi de Sion, il abolit la propriété privée et l’argent, impose le travail forcé, la polygamie et surtout la terreur.
“C’était un véritable monstre, un boucher adepte du cannibalisme, un personnage aussi charmant que Hitler”, ironise le metteur en scène italien Stefano Vizioli dans une interview à l’AFP.
Mais il était surtout un “manipulateur manipulé par ceux qui voulaient qu’il soit prophète”. “S’instaurant fils de Dieu, il est justifié à être un bourreau. C’est un thème très moderne et un opéra très politique”, souligne le directeur artistique du Théâtre de Pise, en Italie.