Roman d’anticipation au titre provocateur ou cri du cœur d’une amoureuse de la France et de sa culture qui prend conscience d’une effroyable réalité?
L’auteur répond à cette question par une indéniable connaissance de notre pays et de son histoire. Pour beaucoup d’étrangers francophiles qui se rendent en France, la réalité de notre société saute aux yeux. L’étonnement succède à la stupéfaction. Comment les Français n’en sont-ils pas conscients alors qu’il suffit de faire quelques mètres dans les rues de notre capitale ou d’une autre de nos grandes villes pour le constater et en être convaincu?
C’est alors que nos amis francophiles sont confrontés au grand mensonge, au grand tabou. Ils se rendent compte très vite que leurs questions sur ce point sont incongrues, indécentes. Lâcheté ou connivence, tout le monde en France nie cette réalité. Tout du moins en public et de surcroît avec des inconnues. Ce n’est pas une réalité, juste une impression leur rétorque-t-on. Mais si nos amies francophiles parviennent à tisser de véritables liens avec quelques Français, ils découvrent alors que ces derniers sont parfaitement conscients du phénomène, de sa gravité et de la peur qui grandit. En parler ouvertement est risqué. C’est pourquoi les Français n’en parlent qu’en privé et entre amis proches. Rien d’étonnant donc que ce soit une francophile d’origine russe et qui a donc connu les délits d’opinion, les accusations de comportements déviants, les vérités dites sous le manteau qui signe ce roman. Car au-delà de la réalité immédiate, c’est le régime totalitaire de la pensée unique qui est dévoilé. Au travers du récit ce sont les comportements actuels qui sont mis en évidence.
En 2048, la France est devenue musulmane, Notre-Dame de Paris est transformée en mosquée et seule une infime minorité de « résistants » a refusé la conversion. Elle en paie le prix par son statut de seconde classe, sa mise à l’écart physique au travers du ghetto et la conviction d’une fin prochaine. Malgré le peu d’espoir qui lui reste, cette minorité sécrète des combattants qui parviennent, pour l’honneur de tous, à défier l’autorité des mollahs, à les terroriser en usant des avantages du maquis urbain. Ces résistants ne peuvent compter que sur eux-mêmes, car bien que l’Europe de l’Est ait échappé au terrorisme du nouveau siècle et continue à faire face, son aide reste limitée. Certes, les principaux conseillers et organisateurs des réseaux sont membres des services secrets slaves mais l’éventualité d’une libération n’est même pas envisagée tant l’ennemi est puissant et la soumission/conversion du grand nombre irréversible. Vivant les heures les plus sombres de leur Histoires, ces Français portant en eux l’âme de leur peuple et de leur culture décident dans un ultime et sublime combat d’en soustraire au régime honnis le symbole pluriséculaire : Notre-Dame de Paris.
Le tragique de leur situation, le déterminisme et l’engagement qui est le leur nous rappellent ceux des éros de la Condition humaine.
Comme beaucoup de romans d’anticipation celui-ci met à nu et dénonce les comportements et attitudes actuels à l’origine du drame. Une phrase revient de façon lancinante à l’esprit de l’un des éros: « Au cours du XXème siècle, ils n’ont fait que céder et céder encore, par petites étapes, par petits morceaux » Ces reculades sont le résultat des lâchetés quotidiennes, petites ou grandes, de l’indifférence, de l’ignorance et de la bêtise, du carriérisme et de l’arrivisme.
La diaspora des futurs maîtres du pays sait utiliser les faiblesses de notre société, les mots magiques qui viennent à bout de toute résistance et de toute logique. Le recours aux « Droits de l’Homme » est fait à tors et à travers, les dénaturant de leur signification première et finissant même par en trahir l’esprit. Mais qu’importe ; ils sont devenus un outil commode entre les mains de certains pour parvenir à leurs fins et les résultats sont là. Cette arme du terrorisme jadis intellectuel mais de plus en plus judiciaire est la prémisse du totalitarisme. « Et, dans la panique, elle continuait à céder ce qu’elle donnait jadis par bêtise ». Le recours à l’Humanisme, utilisé jusqu’à la caricature fait fléchir les autorités de nos démocraties. Les groupuscules et minorités savent quels sont les mots flatteurs et magiques pour berner les occidentaux aussi prétentieux qu’ignorants et de plus en plus acculturés.
L’auteur ne s’embarrasse pas de faux-semblants et constate que l’Occident nourrit et instruit ceux qui veulent sa perte. Que ceux-ci « ne produisent rien », « sont sans morale personnelle », « grands amateurs d’aides sociales ». Sa connaissance de notre société ne s’arrête pas là. Elena Tchoudinova évoque ces catholiques libéraux et autres bien-pensants, réservoir inépuisable d’idiots utiles. Elle fait par ailleurs de nombreuses références à l’Eglise catholique, à son Histoire et à ses rites. Sa connaissance du catholicisme et notamment du mouvement intégriste est remarquable.
Elle traite aussi, au travers de certains de ses éros, de la guerre en Tchétchénie et au Kossovo pour stigmatiser l’Occident qui sans cesse a pris fait et cause pour l’islam contre les Slaves et a donc, par là, trahi ses proches.
Comme le sous-titre le précise, ce roman est avant tout un roman mission. Les éros sont mus par leur fois ou finissent par la redécouvrir. La foi chrétienne devient le ressort de toute action et de tout sacrifice. Chacun, dans le roman, porte sa croix et marche vers le sacrifice suprême pour le salut de tous.
Roman mission aussi par le message qu’il nous transmet et les questions qu’il suscite sur nos comportements actuels en tant qu’héritiers de grande civilisation et adeptes d’une religion. Ce combat est un combat pour les valeurs qui fondent l’identité de l’Occident. Il nous invite donc à réagir avant qu’il ne soit trop tard. La fin tragique n’est là que pour conjurer ce qui peut apparaître comme une fatalité si nous acceptons à la fois le terrorisme mou du politiquement correct et continuons à céder face aux exigences éhontées des minorités structurées qui, elles, ont su garder la fierté de leur identité.
Notons qu’il est surprenant que ce livre n’ait pas été formellement interdit tant l’auteur soulève de vérités et de tabous. Il est toutefois condamné à la confidentialité par le système de distribution. Il est ainsi, comme de trop nombreux autres ouvrages, victime d’un autodafé par anticipation. Empêcher qu’un livre ne soit publié ou diffusé a le même effet et le même objectif que de le brûler en place publique.
Ecrivain reconnu, fine connaisseuse de la France, Elena Tchoudinova a vendu 100. 000 exemplaires de son roman en Russie depuis sa parution en 2005. Elle a mis trois ans avant de trouver un éditeur dans le pays où l’action du récit se situe, la France.
Lu sur Polémia