Les scènes de sexe non simulées dans les films ne sont désormais plus interdites aux mineurs. Telle est la décision que vient de prendre le Conseil d’État. La haute juridiction a jugé légal le décret pris en ce sens en février 2017 par l’ancienne ministre de la Culture Audrey Azoulay.(…)
Le décret de février 2017 a donc assoupli la classification en supprimant la référence au “sexe non simulé”. Il a été attaqué devant le Conseil d’État par les associations Promouvoir et Action pour la dignité humaine. Mais les juges du Palais Royal ont rejeté tous leurs arguments.
Contraire au code pénal?
D’abord, les associations prétendaient que ce décret, en permettant de montrer aux mineurs des scènes de sexe, violait le code pénal -plus précisément l’article 227-24 qui punit de 3 ans de prison et 75.000 euros d’amende la diffusion de messages “à caractère violent, ou incitant au terrorisme, ou pornographique, ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, lorsque ce message est susceptible d’être vu ou perçu par un mineur”. Mais cet argument a été rejeté par le Conseil d’État, qui a jugé suffisants les critères d’interdiction aux mineurs du nouveau décret (cf. encadré ci-dessous). Lors de l’audience, le rapporteur public du Conseil d’État Edouard Crépey a plaidé: “L’acception de la pornographie et de la violence par le législateur pénal ne va pas jusqu’à imposer que tous les films qui comportent des scènes de sexe ou de grande violence, ne puissent être représentés à des mineurs. Ce serait au demeurant anachronique, à l’heure de l’internet en libre accès”.
D’autant que cet article du code pénal n’a jamais été appliqué au cinéma. (…)
Classé X ou pas?
Autre argument des associations: tous les films interdits aux mineurs devraient être classés X. Mais, là encore, cet argument a été rejeté. “Un critère artistique a été ajouté à bon droit” dans le nouveau décret pour classer X ou pas les films interdits aux mineurs, a estimé Edouard Crépey. Pour lui, “le critère de sexe non simulé avait en pratique perdu toute portée depuis que le Conseil d’État, avec sa décision sur le film Love, avait pris acte de ce que l’éventuel recours à des prothèses ou à des images de synthèse était indifférent eu égard à l’effet produit sur le spectateur. La notion de scènes de sexe non simulées renvoyait depuis lors à la notion de scènes qui présentent, sans aucune dissimulation, des pratiques à caractère sexuel”.
Rappelons que la classification du film est effectuée par le ministre de la Culture, après avis consultatif de la commission de classification des films -avis qui est suivi dans la quasi-totalité des cas.
Impact économique important
Cette classification est “très importante pour la vie économique du film”, soulignait Audrey Azoulay. En effet, en salles, une interdiction aux moins de 18 ans réduit d’abord le nombre de spectateurs potentiels, mais ferme aussi les portes des grands circuits comme UGC ou Pathé, dont la politique est de ne pas projeter de films interdits aux mineurs. Ensuite, certaines plateformes de vidéo-à-la-demande comme iTunes refusent les films interdits aux moins de 18 ans. Enfin, à la télévision, un film interdit aux moins de 18 ans ne peut être diffusé que sur une chaîne payante entre minuit et 5 heures du matin. Et les chaînes gratuites n’ont pas le droit de diffuser avant 22h un film interdit aux moins de 12 ans, et avant 22h30 un film interdit aux moins de 16 ans. Toutefois, par dérogation, un film interdit aux moins de 12 ans peut être diffusé à 20h30 quatre fois par an et par chaîne.(…)