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Un procès orwellien s’orchestre contre la sortie, ce mercredi 27 janvier, de l’extraordinaire document réalisé par les cinéastes François Margolin et Lemine Ould Salem. Le film « Salafistes », auquel Marianne avait consacré plusieurs pages en décembre dernier (« Une caméra en enfer », Marianne n°974), a fait l’objet d’un avis négatif du ministère de l’Intérieur lors de la commission de classification des films qui délivre les visas d’exploitation.
(…) Devant cette affaire, que seule la ministre de la Culture, Fleur Pellerin, peut trancher, le vertige nous saisit. « Salafistes » est une œuvre majeure, tournée en prenant des risques considérables. On y voit le djihad filmé de l’intérieur, au Mali, à Tombouctou au printemps 2012, avant l’intervention française, puis en Mauritanie, près des idéologues du salafisme, en Tunisie au cœur du discours des extrémistes du groupe Ansar al Charia. Grâce à la rigueur et à la détermination des enquêteurs, on découvre l’articulation des discours de mort, leur phraséologie de l’extermination de l’autre et sa mise en pratique.
Cette planète folle des criminels qui nous menacent, au loin et tout près, tirent sur nos rédactions, nos policiers, sur les juifs, sur les jeunes attablés aux terrasses, cette planète a sa logique. Elle est un contre-monde, basé sur la haine et aujourd’hui renforcé, hélas, par le déni bêtifiant et lâche que Marianne dénonce inlassablement. Combien faudra-t-il de morts pour qu’on cesse, dans la coulisse, d’inverser la réalité ? Comment le représentant du ministère de l’Intérieur à la commission du visa a-t-il pu conclure, noir sur blanc, dans les attendus, à « l’apologie du terrorisme » pour un film qui combat ce même terrorisme avec une efficacité qui mérite la diffusion à grande échelle ?