Par Francis Bergeron
« Nous devons réussir à combler autant les petites filles avec des princesses que les garçons avec des chevaliers. » Les ambitions affichées par la société Playmobil sont-elles compatibles avec la théorie du genre, avec les nouveaux dogmes du système en place ? Est-il encore légalement possible d’affirmer, pour un fabricant de jouets, que les petites filles et les petits garçons ne sont pas attirés par les mêmes types de héros ?
La marque allemande Playmobil vient de fêter ses quarante années d’existence et, contrairement au français Starlux, ses petits personnages se déclinent sur une palette d’univers suffisamment large et diversifiée pour attirer autant les filles que les garçons, mais dans des univers le plus souvent différenciés.
Starlux, rappelez-vous : il s’agissait de ces petits personnages de plastique dur représentant des cow-boys et des Indiens, des soldats (légionnaires, parachutistes) ou des chevaliers. Dans les années soixante, les petits garçons faisaient la guerre avec leurs Starlux. La marque Starlux était imprimée en losange sous le socle des figurines. Cette société périgourdine a cessé d’exister en 1996, malgré la tentative tout à fait méritante du chanteur Francis Lalanne de la faire survivre.
Les jouets d’un petit garçon né en 1953, par exemple, se bornaient à ses billes, ses Starlux et ses voitures Solido, Norev ou Dinky Toys. Avec aussi un peu de train électrique : Jouef, Märklin ou Fleischmann. Et parfois du Mécano.
L’apparition des personnages Playmobil, en 1974, a balayé cet univers-là, qui est à présent davantage celui des nostalgiques de leur enfance et des collectionneurs.
On pourrait croire, à l’heure des jeux vidéos, que Playmobil serait à son tour menacé, voire condamné. Il n’en est rien. 60 % du chiffre d’affaires est réalisé à Noël, comme pour les autres fabricants de jeux et de jouets pour enfants, mais à Noël de l’an dernier, Playmobil plaçait encore trois de ses « produits » dans le peloton de tête des dix jeux et jouets les plus vendus en France. Il se vend en effet chaque année 16 millions de boîtes Playmobil. Chaque boîte décline un univers, un thème : les pirates, le ranch, l’école, l’hôpital etc. Il existe même un calendrier de l’Avent en Playmobil, dont il se vend cinq mille exemplaires par an.
Puis l’imagination de l’enfant fait le reste, avec la possibilité de modifier les décors, les tenues et les positions des personnages, ce que ne permettaient pas les Starlux, rigidifiés à jamais dans leurs gestes, dès la sortie du moule.
L’univers Playmobil, on y entre à l’âge de quatre ans pour n’en sortir qu’à dix ou onze ans. Seulement, comme pour le train électrique et les Starlux, chez les sexagénaires, quelques amateurs ayant largement dépassé la classe de 6e tentent de poursuivre ou de retrouver les émotions de leur jeunesse, avec Playmobil, fréquentant son site internet pour compléter ou reconstituer leurs séries.
Mais Playmobil est un produit qui se vend encore d’abord en magasin, beaucoup plus que sur la toile. Raison de plus pour lui rester fidèle !