Si les « migrants » (sic) ont parfois quelques difficultés à s’intégrer à notre société, il est un domaine où ils s’acclimatent plus que facilement. La réclamation de droits présupposés et incontestables étant en France un sport national, il est évident qu’y émigrer, même sans visa, ne peut se faire qu’en emportant dans ses bagages son lot de revendications. Aussi, à Cassel (dans le Nord), les migrants ont-ils décidé de manifester le mercredi 16 août dernier pour réclamer ce qu’il leur apparaîtrait comme des droits inaliénables.
Si l’on en croit les bienveillants journalistes, ceux-ci se plaignent de « leurs conditions d’accueil ». La formule désormais consacrée semble suggérer combien les conditions doivent êtres insupportables et combien les revendications doivent être justifiées. Pour s’en persuader, les photos des journalistes nous montrent celles-ci écrites noir de feutre sur blanc de calicot, banderoles de fortune explicitant de façon concrète ce qui manque à leur dignité : « ÉCOLE POUR TOUS / SANTÉ POUR TOUS / MAISON POUR TOUS / L’ARGENT POUR TOUS / RESPECTEZ VOS PROMESSES / … / Y EN A MARRE. »
Le poids des mots journalistiques ne devrait pas altérer le choc de la photo. Finalement, les conditions du CRTC (centre de répit temporaire et collectif) ne semblent pas si désastreuses. Ce qu’ils réclament n’est ni plus ni moins que le système généreux que la France propose à ceux qui auront franchi la frontière avec un visa (quel qu’il soit, d’ailleurs). L’école est gratuite, la santé est remboursée, le logement est sous prestations, il ne leur manquerait plus que l’argent, une pluie de billets qui devrait s’écouler sur eux… On apprend, cependant, qu’en lieu et place d’argent, ceux-ci ont droit à des tickets utilisables dans les commerces de la commune. Pour autant, cela est révoltant, eux qui aimeraient récupérer de l’argent liquide. On se demande bien pourquoi…
Finalement, être dans le besoin autorise à certains caprices. Quand on a supposément connu les dictatures et la guerre et quand on a dû fuir son pays, avoir de telles exigences relève d’une force de caractère étonnante. Non que l’école, la santé ou le logement ne soient pas essentiels, mais arriver n’importe où et commencer par exiger autant a de quoi surprendre. Je pensais, à lire les grands titres, qu’il leur fallait un toit, de quoi manger, des W.-C. et des douches. En réalité, ils ont mis la barre un peu plus haut, de quoi reconsidérer toute envie de leur apporter une aide. N’en déplaise aux donneurs de leçons, être dans le besoin se mérite.
À l’heure où le pape François émet quelques réserves sur notre capacité d’accueil, ou suppose du moins que l’amour inconditionnel au Christ exige un accueil tout aussi inconditionnel à ces migrants, il est des revendications aux sons discordants et stridents dans le contexte actuel. S’il faut aimer son prochain comme soi-même, sans doute faut-il aimer les migrants comme nos enfants, et leur rappeler que la vie n’est pas un dû perpétuel. Quand un nombre considérable de (trop) bonnes volontés leur donne gîte, couvert, douches et finances, ils se devraient d’abord de les remercier, et d’avoir la colère vindicative modeste.
Au lieu de cela, nous aurons à supporter de sempiternels droits illusoires revendiqués par des migrants arborant des pancartes toutes tracées par le feutre de leurs bienfaiteurs d’extrême gauche. Il est normal que les enfants gâtés de la République apprennent à leurs nouveaux amis comment se comporte un pourri-gâté, dussent-ils annihiler tout désir de charité chez ces bienfaiteurs, qu’elle soit individuelle ou collective. N’en déplaise aux donneurs de leçons et au pape François, les pauvres ne sont plus ce qu’ils étaient.
Pierre Martineau – Boulevard Voltaire