Que boire avec sa verdure?

Par Isabel Orpy

Quel titre ravissant! Il faut être Québecquois pour écrire ainsi. Verdure c’est tellement plus joli que salade. Tout comme il semble tellement plus agréable de manger un guédille que d’avaler un sandwich, fut-il saucisson beurre. Se promener sur les blogues de cuisine québecquois est un ravissement linguistique, l’on y déguste des beignoches, des gourganes (fèves), des rabioles (navets), on y boit des désaltérantes et le pop corn s’appelle maïs soufflé. Certes, de trop nombreuses courgettes se prénomment zucchini… mais ne finassons point.

Le français du Québec diffère des autres français du monde. Cependant, il s’agit bien de français et non d’un créole, d’un dialecte ou d’un patois. Il est important de spécifier qu’il s’agit bien d’un français québécois et non d’un français canadien car il existe au moins une autre communauté francophone au Canada, la communauté acadienne,  différente  tant par l’accent que par le vocabulaire.

Pourquoi le français québécois est-il donc différent de celui de France ? La réponse est historique. Plusieurs témoignages confirment que, dès la fin du XVIIème siècle, la Nouvelle-France s’exprime en français. Or, en France, à la même époque, les patois sont encore très nombreux. En effet, deux Français sur cinq ne comprennent ni ne parlent le français! Seulement un Français sur cinq en a une connaissance active. En 1698, le sieur de Bacqueville, alors Contrôleur général de la marine en visite à Québec, écrit «on y parle ici parfaitement bien sans aucun accent, on ne saurait distinguer le parler d’aucune province dans celui de la canadienne.»

L’usage du français fut donc généralisé au Québec avant de l’être en France. On doit ce fait principalement à deux facteurs. Tout d’abord, les colons de la Nouvelle-France étaient originaires de différentes provinces françaises et tous parlaient donc leurs patois maternels. Or, une fois au Québec, ces hommes et ces femmes se retrouvèrent souvent avec un voisin parlant un patois différent du leur, d’où la nécéssité d’une langue commune. On aurait choisi la plus prestigieuse, celle du roi, le «françois». D’autre part,   les femmes jouèrent alrs un rôle prépondérant car ce sont elles qui apprenaient la langue aux enfants…

C’est ainsi que la Nouvelle-France parla le français de la cour du roi, incluant quelques  particularités, telles que l’usage de «y» au lieu du «lui» (comme dans: J’y ai donné l’argent que j’y dois) ou encore la variante «assisez-vous» au lieu de «asseyez-vous». C’est également du français parisien royal que proviennent les fameux «moé» et «toé». La majorité des colons venant de la Normandie, on retrouve  aussi plusieurs particularités du parler normand tel  le fameux «-eux» en fin de mots comme dans «siffleux, robineux, seineux, têteux, niaiseux, ostineux ou senteux».

 Le français de la Nouvelle-France aussi déjà à développer un lexique différent et unique, empruntant des  néologismes aux langues amérindiennes(calumet, achigan, ouananiche, masquinongé, carcajou, etc.) et d’autres termes au vocabulaire maritime (embarquer, virer, baliser, mouiller, etc.).

Après la conquête britannique de 1759, le Québec se retrouve isolé de la mère-patrie. Plusieurs voyageurs remarquèrent le caractère anglicisant et archaïsant du français du Québec, surtout dans les journaux et le  droit. Depuis la Révolution de 1789, la France a changé de norme, ce n’est plus le français du roi qui y est en vogue mais celui de la bourgeoisie. Or, ce changement n’atteint pas le Québec…

Cependant, le français ne bénéficie d’aucune forme de reconnaissance officielle de la part du gouvernement britannique. Plusieurs secteurs d’activités, tels le droit, la politique et les affaires,  passent aux mains de riches bourgeois anglais et écossais  ne parlant qu’anglais et méprisant souvent les  francophones. Cependant, malgré plusieurs tentatives d’assimilation, le français résiste et persiste.

Le français du Québec subira une période d’anglomanie, pendant laquelle il sera déprécié  au profit de l’anglais, envahi de termes anglais,  considéré comme une langue romantique, inapte aux progrès technologiques et aux  affaires. À Montréal en particulier, le français disparaîtra presque complètement de l’affichage,de  la publicité et des commerces.

Avec les années 1960 advient une véritable renaissance québécoise. La fierté renait, le nationalisme atteint de nouveaux sommets et le français s’affirme comme jamais. Dans ce Québec en ébullition,  des puristes baptiseront le français québécois «le joual» et le décriront comme un parler informe, populaire et anglicisé. On qualifie même ce joual «d’absence de langue». Ces puristes se lanceront dans une guerre aux anglicismes et aux régionalismes afin de «purifier» la langue. Le français de Paris devient alors la norme des médias et des élites.

En réaction à cette épuration”, nombre de Québecquois rétorqueront que cette langue est leur, qu’ils en sont  fiers car elle est le symbole de leur histoire et de l’âme de leur peuple et continueront à la faire vivre.

Que vive le français du Québec!

expressions-quebecoises

Parlure québecquoise

Abrier ou habriller : se couvrir

Accomoder :  rendre service à quelqu’un

Accordez-vous : arrêtez de vous disputer

Accoté :  le fait d’être en concubinage

Accouche qu’on baptise : dis tout de suite ce que tu as à dire

Accrocher ses patins : démissionner

Accroche ta tuque avec d’la broche : tiens toi prêt

Accroche ta tuque : tiens toi prêt

Achaler : importuner, déranger ou agacer quelqu’un

L’affaire est ketchup : la situation est au mieux

Agace-pissette :  une allumeuse

Ajusteur : expert dans les assurances

À la prochaine : au revoir

À la revoyure : au revoir ou à bientôt

Aller aux vues : aller au cinéma

Aller gazer : faire le plein, mettre de l’essence dans sa voiture

Aller sur le trône : aller aux toilettes

Ambitionner su’l’pain béni : abuser d’une situation avantageuse

Aréna :  patinoire publique

Arrête de chialer : arrête de pleurer

Arsoudre : apparaître

Attache ta tuque : tiens toi prêt

Astheure : maintenant

Aubaine (ou vente) :  soldes

Avoir de l’eau dans sa cave :un pantalon trop court

Avoir des bidoux : avoir beaucoup d’argent

Avoir du foin : avoir de l’argent, être riche

Avoir l’air d’un chien savant : passer pour une personne intelligente

Avoir l’air smatte : personne qui a l’air stupide

Avoir la chienne : avoir peur

Avoir la danse de St-Guy : bouger tout le temps

Avoir la flye à l’air : avoir la braguette ouverte

Avoir la falle basse : avoir l’air triste

Avoir la guédille au nez : avoir la goutte au nez ou le nez qui coule

Avoir la gueule fendue jusqu’au oreilles : sourire largement

Avoir les baguettes en l’air : s’énerver

Avoir les bleus : être triste, mélancolique

Avoir le feu au cul : être fâché, désagréable

Avoir le flu : avoir la diahrée

Avoir les shakes : avoir très peur

Avoir les mains plein de pouces : ne pas être habile de ses mains

Avoir une crotte sur le coeur : en vouloir à quelqu’un, avoir de la rancune

Avoir un air de beu (boeuf) : être de mauvaise humeur

Avoir une poignée dans le dos : se faire prendre pour une personne stupide

Babillard :  tableau d’affichage avec punaises

Babines :  lèvres

Babouner : (ou faire la baboune) bouder

Balayeuse :  aspirateur

Balloune :  ballon

Bambocheur : fêtard

Banc de neige :  congère

Backer : donner son accord, son approbation

Balayeuse : aspirateur

Barbier :  coiffeur

Barguinner : marchander quelque chose

Barniques : lunettes

Barrer : fermer à clé sa porte ou sa voiture

Bas :  chaussettes

Bat’feu :  briquet

Batterie:  pile que l’on met dans un appareil

Bazou :  ancienne voiture en mauvais état

Bebelle :  objet sans valeur

Bec :  baiser

Bécosses :  les toilettes

Bécyk :  vélo, bicyclette

Bédaine :  gros ventre

Beurrer épais : exagérer une situation

Bibitte :  insecte

Bienvenu : je vous en prie

Bière tablette : bière tiède

Bitcher : dire du mal de quelqu’un

Blé d’Inde :  maïs

Bleuets : myrtilles

Blonde : petite amie, petite copine

Blouse :  chemise

Bobettes :  culottes ou  sous-vêtements

Boîte à malle :  boîte aux lettres

Bol de toilettes :  cuvette des toilettes

Bonjour : Bonne journée

Bon yeu : Bon dieu

Bon trip : bon voyage

Bosser : se comporter comme si on était le patron

Botcher : bâcler

Boucane :  fumée

Brailler : pleurer

Branler dans le manche :  être incapable de prendre de décisions

Brassière :  soutien-gorge

Break à bras : frein à main

Breuvage :bBoisson

Broche à foin :/strong> quelque chose de mal organisé

Broue : bière

Brûler une lumière rouge : griller un feu rouge

Ça fait plaisir : je vous en prie

Ca fitte ben : ça correspond

C’est pas piquer des vers : c’est très bon

C’est tiguidou : c’est super

Ça me bouillonne dans le fond de la flûte : avoir une envie urgente d’aller aux toilettes

Canne : boite de conserve ou cannette

Capot :  manteau

Capoté : fou

Capoter : être très excité, content

Carosse :  poussette pour bébé

Carte d’affaires : carte de visite

Cassé : fauché

C’est un beau bébé : jolis fille

Cegep :  lycée, collège

Cenne (noire) : pièce d’un centime

Change : monnaie

Chanter la pomme : draguer

Char : voiture

Charger :  facturer

Chaudière :seau

Chauffer :  conduire une voiture

Chaussettes:  pantoufles

Chialer : se plaindre

Chicaner (se) :  se disputer

Chien-chaud :  hot-dog

Chum : un ami., petit-ami quand dit par une fille: “c’est mon chum”

Circulaire : dépliant publicitaire

Citron :  voiture pourrie

Clancher : accélérer

Coquerelle :  cafard

Corde (de bois) : pile ou tas de bois

Coupe (une) : quelques

Courir la galipotte : avoir de nombreuses aventures amoureuses

Craque : fente des seins ou des fesses

Crisser son camp : partir

Crosseur : se dit de quelqu’un de malhonnête

Cruiser :  le fait de draguer

Débarbouillette : gant de toilette

Dépanneur : épicerie de quartier ouverte le soir

Ecrire (faire) à mitaine : faire à la main

En criant lapin : en un rien de temps

Enfarger (s) : s’emmêler les pinceaux

Être rendu au boutte : être épuisé ou être incapable

Être chaud ou être rond : être ivre

Faire dur : avoir une apparence déplaisante ou misérable

Faire la baboune : faire la tête ou faire la gueule

Faire le bébé-la-la : faire le gamin

Fête : correspond à l’anniversaire

Fermer sa trappe : se taire

Fifi : homosexuel

Filière : dossier

Fin :  quelqu’un d’aimable

Flos :  les enfants

Flasheur : clignotant des voitures

 

Fou comme un balai : être content

Foufounnes : fesses

Frencher (se) :  s’embrasser sur la bouche

Frette :  froid

Galarneau :  le soleil

Gang : la bande, le groupe d’amis

Gaz :  l’essence que l’on met dans nos voitures

Garnotte :  caillou

Garrocher : lancer quelque chose

Gino :  macho

Gomme :  chewing-gum

Gosses : testicules

Gratte cenne : radin

Grosse vie sale : se la couler douce

Guidoune : pétasse

J’ai vu neiger avant toi : avoir plus d’expérience que la personne en face

Jaser : discuter, parler

J’en ai en masse ou j’en ai un char puis une barge : j’en ai beaucoup

Je suis tanné : J’en ai marre

Je suis loadé ou je suis dans le jus : avoir beaucoup de chose / travail à faire

J’m’en câlisse comme de l’an 40 : ca ne m’intéresse pas

Joual :  parler populaire québécois

Kekchose : quelque chose

Kétenne : ringard, Kitch

Lâche pas la patate : ne pas abandonner

Lâcher un fiouse : péter

Laveuse :  machine à laver le linge

 

Le chèque est dans la malle : le chèque est partit à la poste

Le yable l’emporte : que le diable l’emporte

Lignes :  la frontière américaine

Longue distance :appel interurbain

Liqueur :  boissons gazeuses,  limonade

Magané : mal en point

Magasiner : faire ses achats, ses courses

Maringouin : moustique

Matante, mononc’ : ma tante et mon oncle

Méchant brochet : personne de stupide

Minoucher :  caresser

Mise à pied : licenciement

Mitaine :  moufle

Musique à bouche : harmonica

Mettre la charrue devant les boeufs : aller trop vite

Ne pas être achalé : ne pas avoir froid aux yeux, être sans gêne

Niaiser : duper, berner, charier

Niaiseux : imbécile, idiot

Nono, nounoune :  abruti

Nourris bien ton cochon, il viendra chier sur ton perron : sera peu reconnaissa

Pantoute :  pas du tout

Parcomètre : parcmètre

Partir le char : démarrer la voiture

Passer dans le beurre : ra son coup

Pas mal : assez

Pas pire : très bien

Patates pilées :  purée de pommes de terre

Pâté chinois :  hachis Parmentier avec du maïs

Patins à roues alignées :  rollers

Pogne pas les nerfs : ne e fâche pas

Glace : patinoire

Peignure : coiffure

Péter une coche : s’enerver

Piasse (piastre) :  Dollar

Pinote : arachide

Pitonner :  zapper avec la télécommande

Pitoune : belle fille

Prendre ça mollo : ne pas s’énerver

Péter plus haut que le trou : être snob

Percer des dents : s’énerver sans raison

Patates pilées : purée de pomme de terre

Partir comme un petit poulet : mourir tout doucement

Placotter :  bavarder

Platte : ennuyeux

Pleut des clous : pleut beaucoup

Pogner :  avoir du succès avec les filles

Quétaine : quelque chose de ringard

Récipiendaire :  lauréat

Rare comme d’la marde de pape : difficile à trouver

Robineux : clochard

Ruine babine : harmonica

Royautés : droits d’auteur

Sacrer : jurer, blasphémer

Sans-dessein (Bande de) : imbécile

Se mettre beau ou belle : être chic

Sécheuse :  sèche-linge

Shack à patate : cantine

Sifleux : marmotte

Sloche : neige fondue

Souffler dans la ballounne :a lcotest quand on est en voiture ou moto

Slaque la pédale : relâcher l’accélérateur

S’exciter le poil des jambes : s’énerver

Se sucrer le bec : manger quelque chose de sucré

Se poigner le moine : ne rien faire, perdre son temps

Sentir le swing : sentir la transpiration

Se mettre sur son 36 : s’habiller de beaux vêtements

Se faire passer un sapin : on lui a fait croire des choses

Se faire brasser le canadien : se faire engueuler vivement

Se coucher à l’heure des poules : se coucher très tôt

Se bourrer la fraise : manger à satiété

S’ostiner : s’entêter

Souffleuse :  chasse-neige

Sous-marin :  sandwich allongé

Sous-ministre :  secrétaire général d’un ministre

Spécial : en solde, en promotion

T’sais : tu sais

Tabarnac : blasphème

Téteux :  un fayot

Ticket :  contravention

Ti-cul :  morveux

Tire d’érable :  sirop de sève qui forme un caramel

Toffe : difficile

Toton :  nigaud, un imbécile

Toune : chanson

Toutoune :  femme dodue

Traîne-sauvage :  luge

Trappe :  gueule

Torcher les petits : prendre soin des enfants

Ton magasin est ouvert : ta fermeture éclair est ouverte

Tiguidou : c’est d’accord !

Trouble :  problème

Tu m’niaises : tu te moques de moi

Tu me tire la pipe (Tirer la pipe à quelqu’un) : faire une blague

Tu veux tu : est-ce que tu veux

Tuque :  bonnet de laine tricotée

Un bon yabe : un bon diable

Un fou dans une poche : opportunité facile à prendre

Une face à claque : un visage qui ne nous revient pas

Valise :  coffre de voiture

Varger :  cogner, donner des coups

Verge : mesure de tissu (36 pouces 91,44 cm)

Vidanges : poubelles

Virage en U :  demi-tour

Vouloir son biscuit : désirer une relation sexuelle

Virer sur un dix cennes : changer de direction rapidement

Vieille minoune : vieille auto mal en point

Va jouer dans l’trafic ! : va-t-en !

Vue (une) :  film

Y fait pas frette : il fait chaud

Y mouille a boire debout : il pleut beaucoup

Y va manger ses bas : il va avoir des problèmes ou des  difficultés

Y va avoir du monde à la messe : une foule

Zigner :  tourner en rond, perdre son temps

Zigonner :  essayer sans succès

Zizique :  musique

 

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