Des collèges et lycées franco-maghrébins?

 

 

C’est ce que préconisait il y a trente ans le ministre de l’Education nationale Jean-Pierre Chevènement : « Il ne s’agit pas de défendre l’identité française, mais de construire celle de 2085, qui inclura une composante méditerrano-islamique ».

Selon « Le Monde » du 8 mai 1985 qui transcrivait cette proposition de Jean-Pierre Chevènement et ses attendus, le ministre de l’Education nationale avait alors proposé de créer des établissements expérimentaux reposant sur des accords bilatéraux avec les pays concernés, dont le modèle existait déjà, à savoir le lycée franco-allemand de Buc dans les Yvelines.

Pour Jean-Pierre Chevènement, il s’agissait d’ « offrir des perspectives » aux générations issues de l’immigration : « je ne serai heureux que lorsqu’ils seront diplomates, savants, généraux, ou même professeurs au Collège de France ».

Cela faisait immédiatement suite au rapport rédigé à l’intention du ministre par un collectif composé d’enseignants, d’intervenants socio-éducatifs, de responsables d’associations et de membres de l’inspection générale réunis autour de Jacques Berque (professeur au collège de France et spécialiste de l’Islam).

Le rapport suggérait de bâtir, sur un canevas entièrement neuf, la réflexion sur l’insertion des immigrés dans l’Ecole. : « le problème doit être considéré non comme un ensemble de difficultés causées à une respectable coutume scolaire, mais comme justiciable d’une stratégie axée sur la France au vingt et unième siècle ».

Puisque l’immigration « n’est plus le fait socio-économique qu’elle a longtemps constitué, mais un problème désormais intérieur à la société française », il ne s’agit plus de s’en remettre à des traitements spécifiques porteurs de marginalisation. Au nom du « droit à la différence » souligne alors Jacques Berque, « c’est à une sorte de ségrégation de l’allogène que nous risquions d’aboutir ».

Un simple enseignement de la langue française réservée aux petits immigrés et coupé du reste de la scolarité doit donc être désormais proscrit ; de même que toutes les pratiques qui, sous prétexte d’accueillir une culture différente, en nient la modernité et la font « déchoir en folklore inoffensif ».

Jacques Berque propose donc d’intégrer les cultures d’origine rebaptisées « cultures d’apport » dans les objectifs de formation de tous les élèves et de leurs enseignants, une mise en commun que permettent « une ancienne tradition humaniste » et la « dimension méridionale » de la culture française. « La culture à laquelle nous avons à former tous les élèves doit désormais, sans pour autant cesser d’être notre culture nationale, s’enrichir de l’apport des cultures autres dont les enfants de migrants sont les vecteurs ».

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