Les Premières Victimes du transhumanisme de Jean-Marie Le Méné

Nos sociétés occidentales étaient récemment outrées par une information fausse selon laquelle l’État islamique aurait condamné à mort les enfants trisomiques… Mais si les trisomiques ont disparu de notre vie quotidienne, ce n’est pas parce qu’ils sont guéris. C’est parce que nous avons usé de nos prouesses techniques pour les éliminer consciencieusement, en raison même de leur trisomie.
« Ou nous les guérirons de leur innocence, ou ce sera le massacre des innocents », affirmait le professeur Jérôme Lejeune, pionnier de la génétique moderne qui découvrit un jour l’origine de la trisomie 21. Il était le plus grand jusqu’à ce que le monde scientifique s’en détourne parce qu’il regrettait publiquement que sa découverte serve à éliminer ceux qu’il aurait préféré guérir.
En digne héritier, Jean-Marie Le Méné signe Les Premières Victimes du transhumanisme. Le débat n’est pas celui de l’avortement, mais celui de l’avortement utilisé pour cibler une population en raison de son génome imparfait. Le vrai sujet de ce livre, c’est l’eugénisme, contre lequel l’Histoire récente aurait dû nous vacciner pour longtemps… Et pourtant.
On achève les 150 pages avec effroi : parce que le constat est glaçant, mais également parce que les conséquences de la politique ouvertement eugéniste menée à l’égard des enfants trisomiques laissent entrevoir des conséquences terrifiantes dans une société qui a remplacé la transcendance par le progrès.
Aucune femme au monde ne souhaite accoucher d’un enfant trisomique, il faudrait être fou. Mais lorsque, d’une grossesse sur 700, l’enfant est atteint, que faire ? 96 % d’entre eux sont avortés et la société se félicite de la disparition d’un mal, semblant confondre la maladie et celui qui en est atteint. Pire encore : la médecine change de camp pour abonder dans le même sens…
La réalité que dévoile ce livre, c’est que l’élimination rapporte plus d’argent que la recherche. Notre bonne conscience n’a fait que changer le sens des mots pour justifier l’injustifiable, comme si souvent.
Dans son ouvrage facilement abordable jusque dans les questions techniques, Jean-Marie Le Méné se fait l’avocat de ceux qui n’en ont plus. Ces enfants accusés d’être des « poisons » par un professeur de médecine au micro de France Inter sont l’objet d’une traque médicale, scientifique, technique et finalement financière dont très peu réchappent. Mais cela ne suffit pas : un député a osé s’offusquer, sur les bancs de l’Assemblée nationale, qu’il en naisse encore 4 %… La disparition doit être totale.
Dans les dernières pages de son livre aussi concis que précis, Jean-Marie Le Méné évoque un épisode décisif dans sa décision d’écrire, qu’il doit au CSA. Juin 2015, ce dernier décide d’interdire un clip intitulé « Chère future maman », qui met en scène des personnes trisomiques devenues adultes, souriantes et rassurantes. Selon le CSA, le message aurait pu culpabiliser les femmes qui auraient choisi d’avorter. L’entreprise mortifère va donc jusqu’à supprimer aux trisomiques le droit de dire au monde qu’ils sont heureux quand même.
Il est vrai qu’un trisomique coûte plus cher vivant que mort et c’est le seul critère qui a orienté la course folle du dépistage anténatal ciblant la trisomie 21, proposé par une société qui s’enorgueillit sans cesse de son « humanisme »…
Jean-Marie Le Méné peut être fier de ce nouveau cri de détresse qui lui vaut des injures : il est vrai que l’on est tenté de détester ce livre qui égrène nos trahisons ou démissions successives et inavouables… mais tous les hommes attachés à leur liberté devraient faire l’effort de lire, au moins pour savoir.

Charlotte d’Ornellas – Boulevard Voltaire

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