Outre privatiser la plage de Vallauris sans autorisation, faire construire un ascenseur pour y accéder et autres passe-droits… voici la petite histoire de celui par qui les scandales d’Etat arrivent… et vont se succéder du fait de la dhimmitude gouvernementale! (NDLR)
Villa mythique des années 1930, rachetée en 1979 à l’Aga Khan par le futur roi Fahd, le Château de l’Aurore était tombé ces dernières années dans une profonde léthargie. «Voilà plus de trois ans que nous n’y avons vu personne, à part le personnel d’entretien, confie un voisin. Depuis quinze jours, le château est devenu une ruche. Des dizaines d’ouvriers s’affaire à tout repeindre et remettre en état. Des lauriers roses ont été plantés, des centaines de pots de fleurs apportés pour décorer les terrasses. Dehors, quarante véhicules sont garés le long de la route. Un hélicoptère a même été mobilisé pour transporter du matériel lourd. Cette semaine, les travaux sont toujours en cours. Tout doit être prêt pour la visite du monarque qui a été reportée de quelques jours.»
Entre Clochemerle et raison d’Etat, les hostilités avec la population ont démarré le jeudi 9 juillet dernier. «Nous étions à la plage quand sont arrivés des ouvriers, raconte Jean-Claude Weill. Ils ont creusé un grand trou de trois mètres sur quatre et l’ont entouré d’un grillage condamnant un tiers de la plage. Le lendemain, une dalle de béton a été coulée et deux ouvertures ouvertes dans le mur en surplomb, pour installer un accès direct entre la plage et la propriété du roi.»
DES TRAVAUX EN INFRACTION FLAGRANTE AVEC LA LOI LITTORAL
Ces travaux sur le domaine maritime, en infraction flagrante avec les règles de l’urbanisme et la loi Littoral, déchaînent la colère des usagers de la Mirandole. «Dès le vendredi soir, j’ai été alerté par les habitants, raconte Jean Noël Falcou, conseiller municipal écologiste de Vallauris-Golfe-Juan et représentant local de l’association anti-corruption Anticor. Le lendemain, je me suis rendu sur place puis j’ai saisi les autorités, l’adjoint au maire chargé de l’Urbanisme et la DDTM, la Direction départementale des territoires et de la mer.»
La municipalité ne tarde pas à réagir. Le lundi, un contrôle est effectué sur les lieux et un PV dressé pour modification sans autorisation de la façade du bâtiment. L’élu pense le litige enterré. Pourtant, deux jours plus tard, les travaux reprennent de plus belle. Sûrs de leur impunité, une demi-douzaine d’ouvriers sont surpris en train de percer des trous dans les murs du tunnel de la SNCF et d’amener des grilles métalliques pour clore l’accès à la plage. Cette fois, Michelle Salucki, la maire UDI de Vallauris, fait intervenir la police pour arrêter les travaux. Le chef du chantier est embarqué au commissariat.
Alerté par la mairie, Philippe Castanet, le sous-préfet de Grasse, joue l’étonné. «L’entrepreneur pensait que les autorisations avaient été sollicitées et obtenues par le secrétariat du roi d’Arabie Saoudite, ce qui n’a pas été fait, explique-t-il alors. On a découvert le chantier en même temps que les riverains. Les travaux ont été stoppés car ils ne sont pas légaux».
Comment la France pourrait-elle s’opposer à la volonté de l’omnipotent roi d’Arabie Saoudite, un pays dont François Hollande fait le pivot de sa politique dans le Golfe Persique, signataire de 11 milliards d’euros de contrats avec nos entreprises? Finalement, les pouvoirs publics vont céder aux exigences du monarque. «Pour des raisons de sécurité, la plage de la Mirandole sera fermée au public pendant le séjour du souverain, annonce le sous-préfet. Il ne s’agit pas de privatiser une plage mais de protéger le dirigeant d’un pays en guerre.» La pose de la grille ne sera pas autorisée. Mais la fameuse dalle de béton, celle par qui le scandale est arrivé et qui devrait servir à installer un escalier ou un ascenseur, pourra rester en place. Toutefois, assure le représentant de l’Etat : «Un bail sera signé. Un loyer devra être payé et les installations ainsi que la dalle détruites une fois les vacances du roi terminées».
Ces décisions ne suffisent pas à calmer les esprits. «La sécurité a bon dos. Les Saoudiens veulent mettre la main sur notre plage pour leur plaisir personnel, tempête Blandine Ackermann, l’intraitable présidente de Association de défense de l’environnement de Vallauris Golfe-Juan (ADEGV). Voilà trente six ans que la famille royale est installée à Vallauris. Jamais la plage n’a posé de problèmes de sécurité. Pourquoi ne pas interdire aussi la circulation sur la voie de chemin de fer et sur l’ancienne Nationale 7 qui jouxtent la propriété?» Le conseiller écolo Jean-Noël Falcou demeure également mobilisé. «Ces passe-droits sont inacceptables, dit-il. La loi doit être la même pour tout le monde. L’Etat envoie un très mauvais signal en remettant lui-même en cause les textes qu’il est censé faire respecter.» Lancée à son initiative, une pétition a déjà recueilli 3000 signatures pour réclamer le maintien de l’accès à la plage. Et Blandine Ackermann, qui a écrit au Préfet, envisage de déposer plainte, comme elle l’a déjà fait plusieurs fois avec succès dans le passé.
LE CHÂTEAU OÙ LE PRINCE ALI KHAN S’EST MARIÉ AVEC RITA HAYWORTH
Car le Château de l’Aurore et ses propriétaires Saoudiens n’en sont pas à leur première polémique. Construit en 1932 pour l’actrice américaine Maxine Elliott, le bâtiment, chef d’oeuvre de l’architecte Barry Dierks, est à l’origine une demeure raffinée, «palais blanc posé sur les eaux». Winston Churchill, Greta Garbo ou Maurice Chevalier viendront y apprécier la vue magique sur la mer Méditerranée. Le Château de l’Horizon, son nom de l’époque, a son heure de gloire, le 27 mai 1949, quand le nouveau propriétaire des lieux, le prince Ali Khan, fils de l’Aga Khan, épouse à Vallauris la star d’Hollywood Rita Hayworth. Ali et Rita arrivent dans une Cadillac blanche décapotable. Trente mille roses ornent les lieux. Et quatre cent cinquante litres d’eau de Cologne ont été déversés dans la piscine où flottent des couronnes d’oeillets blancs.
Après 1979 et son rachat par les Saoudiens, l’élégante villa va être transfigurée, pour ne pas dire défigurée, par d’importants travaux d’extension. Gérée par la Fondation Asturion, une société-écran du Liechtenstein, domiciliée en France à l’adresse de l’ambassade d’Arabie Saoudite à Neuilly, elle devient une sorte de forteresse de béton, s’étendant sur plus d’un kilomètre de long, avec piste d’hélicoptère et salle d’opération médicale. Les rois du désert ont longtemps bénéficié de l’indulgence des autorités françaises. Ils s’embarrassent peu des permis de construire et des lois de l’urbanisme. Ce qu’il leur a valu plusieurs fois de se retrouver devant les tribunaux. Avec son association, Blandine Ackermann, appuyée par Jean-Noël Falcou, est ainsi parvenue, au terme de sept années de procédure, à imposer aux Saoudiens le respect du «sentier littoral», qui passe au pied de leur château. Les deux militants ont aussi bloqué la construction d’une digue non conforme. Et dans l’affaire du «Château Robert», du nom d’une vaste propriété voisine également acquise par la famille royale, ils ont déposé une plainte contre X dénonçant le «déclassement» de 4 hectares de zone boisée non constructible pour y construire deux mirifiques villas de 1000 m2 chacune, ensuite mises en vente pour 60 millions d’euros.
A Vallauris, les défenseurs de l’environnement attendent donc de pied ferme le monarque d’Arabie Saoudite, qui risque aussi de se voir reprocher le sort du blogueur saoudien Raif Badawi, condamné à Ryad à dix ans de prison et 1000 coups de fouet. Les vacances françaises du roi Salmane ne s’annoncent pas de tout repos.