Vidéo / Jeux interdits (ressort en version restaurée)!

 

1952 : la concurrence est rude dans les salles de cinéma. Heureuse époque où la fréquentation flirte avec les 400 millions d’entrées, à comparer avec les 200 millions d’aujourd’hui. Cette année-là, de Chantons sous la pluie à Fanfan la Tulipe en passant par Le train sifflera trois fois et Casque d’or, le spectateur n’a que l’embarras du choix. À côté de toutes ces productions de prestige, un “petit” film français en noir et blanc fait entendre sa différence. Sur fond d’une inoubliable musique signée Narciso Yepes et qui sera reprise par des générations d’apprentis guitaristes, cinq millions de spectateurs découvrent alors une fillette de 5 ans, aux cheveux blonds et au regard clair, qui enterre les petits animaux comme on fait avec les grandes personnes. À travers les yeux de Brigitte Fossey, Jeux interdits – Lion d’or à Venise 1952, oscar du meilleur film étranger 1953 –, de René Clément, qui se déroule lors de la débâcle de 1940, dénonce l’absurdité de la guerre sans se payer de mots. Le film, à la puissance émotive intacte, ressort en version restaurée.

Unknown-3“Rrrené, assieds la petite!”

“On ne m’avait absolument pas demandé mon avis, se souvient Brigitte Fossey. En vacances à Cannes, ma tante avait lu une petite annonce dans Nice-Matin : “René Clément cherche deux enfants entre 9 et 12 ans.” Elle avait parié avec ma mère que je serais prise.” Voyant arriver ce bout de chou, le réalisateur de La Bataille du rail et du Père tranquille lui dit qu’elle est trop jeune lorsque résonne la voix de sa femme, l’autoritaire et d’origine slave Bella Clément : “Rrrené, assieds la petite!” Le cinéaste de s’incliner et après avoir effectué un test – il s’agissait de raconter une histoire en riant et en pleurant – il choisira Brigitte Fossey.

À l’origine, Jeux interdits devait être un court métrage. Mais c’est Jacques Tati, découvrant les premières bobines, qui incitera son ami René Clément à le rallonger. Les parents de Brigitte Fossey, qui ne veulent surtout pas transformer leur petite fille en singe savant, insistent pour que le tournage se déroule essentiellement pendant les vacances scolaires. “Tout le monde était très gentil avec moi, dit celle qui sera la maman de Sophie Marceau dans La Boum. Je n’avais pas trop de mal à jouer la comédie sauf, dans les moments dramatiques, quand je devais me comporter comme une petite orpheline alors que mes parents étaient avec moi sur le plateau. Ce sont eux qui jouent mes parents dans le film, d’ailleurs, et je viens de découvrir qu’ils ne sont pas au générique. Mon père qui a 98 ans et ma mère 92, grands cinéphiles devant l’Éternel, comptent bien aller en salle pour le revoir. C’est grâce à eux que je n’ai pas eu la grosse tête. Quand j’ai obtenu le prix d’interprétation à Venise, ma mère n’arrêtait pas de me dire : “À travers toi, les gens applaudissent René Clément.” Ce sont des choses que l’on n’oublie pas.”

JSource

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