Le 25 novembre 2017, le Président Macron prononçait un discours à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femme et du lancement de la grande cause du quinquennat. Extraits : « Le sentiment d’horreur et de honte que suscite cette situation, je dois le dire, a pris une épaisseur toute particulière… c’est bien de la honte dont il s’agit lorsqu’on est à la fois un homme et lorsqu’on est décideur public… et on ne peut pas considérer que ce dont nous parlons aujourd’hui est quelque chose de banal, d’acceptable, dont on pourrait accepter la moindre part ou le début d’ambiguïté. »
Comment ne pas être d’accord sur un tel discours. Un discours qui, aujourd’hui, raisonne curieusement lorsqu’on habite Carpentras et ses environs, dans le Vaucluse. En effet, le maire et président de la communauté d’agglomération, l’ancien socialiste Francis Adolphe, soutien d’Emmanuel Macron lors de la campagne 2017, vient de voir son pourvoi rejeté par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Un pourvoi qui faisait suite à sa condamnation, en juin 2017, par la cour d’appel de Nîmes pour violences sur son ex-compagne. Francis Adolphe est donc condamné définitivement, les voies de recours étant épuisées, à huit mois de prison avec sursis, 5.000 euros d’amende et cinq ans d’interdiction des droits civiques et familiaux. Il nous a été donné de lire l’arrêt de la cour d’appel, le jugement étant rendu au nom du peuple français, et, il faut l’avouer, les mots du président de la République « horreur » et « honte » raisonnent effectivement bien curieusement…
L’information concernant le rejet du pourvoi fut rendue public vendredi dernier par Hervé de Lépinau, conseiller municipal Front national de Carpentras. Dans un premier temps, Francis Adolphe affirma qu’il n’était pas au courant et s’étonna publiquement que le Front national fût au courant, reprochant à Lépinau, par ailleurs avocat, d’utiliser ses réseaux. Interrogé sur l’existence de ces supposés réseaux, Me de Lépinau répondit : « Internet, Légifrance ! » !
Mais le plus étonnant restait à venir. Condamné en première instance, en appel et définitivement – compte tenu du rejet du pourvoi -, Francis Adolphe invoque maintenant sa « présomption d’innocence ». Sans doute du jamais-vu dans les annales judiciaires. Au plan politique, le très macro-compatible Francis Adolphe refuse de démissionner de ses mandats et s’y accroche comme une bernique à son rocher, attendant sans doute que le préfet fasse son œuvre, c’est-à-dire le destitue.
La macronie locale est, pour l’instant, très silencieuse. Brune Poirson, secrétaire d’État auprès de Nicolas Hulot, élue députée l’an passé à Carpentras avec le soutien actif de Francis Adolphe et, évidemment, grande défenderesse de la cause des femmes, ne s’est pour l’instant pas exprimée. On attend, d’ailleurs, avec impatience la réaction de Mme Schiappa, secrétaire d’État à l’Égalité femmes-hommes, face à une affaire jugée définitivement, elle qui qui s’était permis de commenter une affaire judiciaire en cours – la triste affaire Daval – et était montée sur ses talons de 15 lorsque l’animateur Tex avait fait une vanne sexiste. Une madame Schiappa qui, du reste, lors de son fameux tour de France de l’Égalité femmes-hommes dans le Comtat Venaissin, évita soigneusement Carpentras pour porter la bonne parole du combat contre les violences faites aux femmes, dans une ville limitrophe.
Très lyrique, à la fin de son discours du 25 novembre 2017, Emmanuel Macron évoquait Baudelaire écrivant à sa mère. « Une nuit où il parlait de son découragement, du caractère insupportable de la vie. Et au milieu de la nuit, il décrivait ce moment, celui où souvent il se mettait à écrire de ce qu’il appelait “le ressaisissement”. C’est ce qui est en train de se passer dans la société française, c’est le moment du ressaisissement. » Dans la société française. Et à Carpentras ?
Violences faites aux femmes : une cause nationale ? Une cause municipale, ce serait déjà pas mal.
Georges Michel – Boulevard Voltaire