L’épée enchantée ! Issu d’un ensemble de textes médiévaux centrés autour de la figure du Roi Arthur, le cycle arthurien compte parmi les plus merveilleuses gestes européennes. Au XIIe siècle, Chrétien de Troyes fixe par écrit la légende dans ses Romans de la Table Ronde et fait émerger la quête du Graal.
De cette légende, le cinéma s’est emparé et, d’Excalibur (1981) de John Boorman aux Chevaliers de la Table Ronde (1953) au technicolor flamboyant de Richard Thorpe, en passant par Perceval le Gallois (1978) de Eric Rohmer, Lancelot du Lac (1974) de Robert Bresson, Camelot (1963) de Joshua Logan, Merlin l’Enchanteur (1963) de Wolfgang Reitherman chez Disney au plus récent Le Roi Arthur (2004) d’Antoine Fuquat, on ne compte plus les versions, plus ou moins heureuses, ayant pour thème la légende arthurienne.
Aujourd’hui, c’est donc Guy Ritchie (Sherlock Holmes, Les Agents très spéciaux) qui s’attaque au mythe arthurien et… le piétine, le massacre pour en faire un fatras, un salmigondis, du genre glaviot gluant naviguant entre Le Seigneur des Anneaux, Conan le Barbare, voire le roman La Tour Sombre de Stephen King, et autres films d’héroïc-fantasy baignant dans une atmosphère sombre d’un Londonium crasseux et d’un Camelot lugubre qui n’auraient de médiéval que l’apparence d’un jeu vidéo tape-à-l’œil façon Warcraft ou Games of Thrones, bourré d’effets spéciaux, de créatures monstrueuses – notamment des « éléphants » machines de guerre gigantesques jouant du boulet de démolition – et de gros bras se trucidant au fil de l’épée et courant dans tous les sens comme des lapins auxquels on aurait fait avaler une pile Duracell. Le tout avec un casting ethniquement correct : outre Charlie Hunnam en futur Roi Arthur recueilli, tel Moïse, et élevé par des prostituées, Eric Bana alias Uther Pendragon père d’Arthur, Jude Law en infâme usurpateur Vortigem et Astrid Bergès-Frisbey en magicienne (exitMerlin), on trouve au générique, cerise sur le cake, deux chevaliers pour le coup… très Noirs, ainsi qu’un Chinois du style maître kung-fu pour « petit Scarabée » qui, après la bataille pour le royaume, s’assiéront autour de la Table Ronde.
Bref, du grand n’importe quoi aussi artificiel qu’inconsistant, qui, s’il s’était intitulé « Tartempion chez les Anglo-Normands », aurait pu être plaisant dans le genre héroïc-fantasy. Manque de chance, cette relecture rock’n’roll de la légende du Roi Arthur a tout du cinoche pour ablation de neurones. D’où un gâchis de l’inculture américaine à vous faire avachir comme une vieille paire de pantoufles usagées au fond de votre fauteuil. Un coup d’épée dans l’eau, saumâtre !
Photo en Une
Politiquement correct et parité ethnique oblige : deux chevaliers Noirs sont invités à la table du Roi Arthur