Des chantiers interminables, avec des ouvriers invisibles. Paris souffre. Paris n’en peut plus. Paris rouspète. Le Parisien a relevé pas moins de 7.396 chantiers aussi divers que variés qui encombrent les rues et les trottoirs de la capitale au grand dam des Parisiens, qu’ils soient automobilistes, cyclistes ou piétons, et des touristes qui ne peuvent pas photographier nos monuments sans qu’il y ait des barrières, des plots, des trous.
Le plus formidable, c’est que sur cette multitude de chantiers, vous aurez beaucoup de mal à voir des ouvriers. Alors, les travaux s’éternisent. L’avenue de Versailles, par exemple, réduite à deux voies par des barrières qui protègent des espaces vides de toute activité sans qu’un panneau n’en annonce la raison. Cityramag cite la réponse de Jean-Louis Missika, adjoint municipal en charge de l’urbanisme. « Dans 90 % des cas, les travaux, ce n’est pas nous, et nous ne pouvons pas refuser quand des acteurs comme GRDF, par exemple, demandent à faire des travaux. »
Un pourcentage très sous-estimé, puisque la ville de Paris reconnaît que, sur ces milliers de chantiers, 643 dépendent d’elle. Et de publier sur son site Paris.fr la carte de ces empêcheurs de circuler. Les autres travaux, 3.534, relèvent d’entreprises privées qui œuvrent sur les façades ou sur la réfection d’immeubles de particuliers, et 3.219 sont le fait des opérateurs de réseaux, téléphones, gaz, électricité. Le pire, pour ces derniers travaux, est le peu de coordination qui règne entre eux. Le chantier qui vient de changer les conduites de gaz est à peine terminé, le goudron à peine sec que d’autres ouvriers arrivent pour défoncer, à nouveau, la chaussée ou le trottoir pour y installer, par exemple, les câbles de fibre optique.
C’est le centre de Paris qui concentre le plus de chantiers : 588 pour le 8e arrondissement, 337 pour le 9e, 235 pour le petit 2e, 279 pour le minuscule 1er, mais c’est le grand 16e qui bat les records, avec 604 chantiers, suivi de près par le 15e, où les habitants n’en dénombrent pas moins de 577 !
S’il n’y avait que le nombre, et si les ouvriers y travaillaient normalement et en nombre suffisant, le problème des embouteillages insupportables serait limité. Mais non, lenteur et désorganisation sont les deux mamelles de base de ces travaux censés améliorer le cadre de vie des Parisiens. En Chine, ce genre de travaux serait terminé en quelques semaines, voire quelques jours. À Paris, une prime au moindre effort semble avoir été promise à ces entreprises de travaux publics. Et plus les chantiers durent, plus ils coûtent. Voilà, peut-être, l’une des raisons possibles de l’incroyable dette dont Mme Hidalgo se refuse à imaginer qu’elle est de près de six milliards d’euros, soit, selon l’iFRAP (Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques), de 2.835 euros par habitant, nouveau-nés compris ! Il y a cinq ans, à la fin du mandat de Delanoë, elle était de 1.636 euros.
Vous me direz, mais Paris vaut bien la peine d’être embelli, d’être modernisé, d’être flamboyant pour les Jeux olympiques de 2024. Une échéance qui va faire vivre de nouveaux cauchemars aux Parisiens qui vont voir fleurir d’autres chantiers pendant les cinq prochaines années. Sans compter la pauvre île de la Cité, martyrisée par l’incendie de Notre-Dame…
« C’est le b… » : ce cri n’en finira donc pas d’être répété des milliers de fois chaque jour !
Floris de Bonneville – Boulevard Voltaire